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Christophe Praud, CJD -  Un président qui n’a pas la langue dans sa poche

Christophe Praud, CJD - Un président qui n’a pas la langue dans sa poche

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Derrière les femmes – trop rares – ou les hommes entrepreneurs que nous rencontrons pour nos portraits, se cache toujours une grande personnalité. Plus grand dénominateur commun : la passion de ce qu’ils entreprennent. Christophe Praud ne fait évidemment pas exception à la règle. Avec un plus ! Il ose dire ! Il appuie là où ça fait mal. Il ne tourne jamais autour du pot. Sa franchise lui vaut l’image d’un homme franc et direct qui ne mâche pas ses mots. Dérangeant parfois, mémorable toujours, c’est en tout cas ce que certains appellent la méthode Praud ! Depuis qu’il en a pris la présidence, il semblerait même que la couverture média du CJD ait très sensiblement augmenté. Rien d’étonnant.

 

Entretien avec Christophe Praud, Président National du Centre  des Jeunes Dirigeants d’Entreprise

GPO Magazine : D’après vous, en tant qu’entrepreneur, quels sont les paramètres de la réussite ?
Christophe Praud : Je pense qu’être entrepreneur est le fruit d’une envie plus forte que tout. J’ai pu constater que les entrepreneurs possèdent une espèce d’ADN en commun, qui les place dans un état d’esprit qui enclenche le phénomène de création. À un moment donné, le créateur ou le repreneur veut être un acteur ayant la maîtrise de ce qu’il veut faire et des événements.
Je crois qu’on est entrepreneur au fond de soi mais que, durant une partie plus ou moins longue de sa vie, on l’ignore. Mais ce désir est en sommeil. S’il doit se réveiller, il émergera à un moment ou à un autre… ou jamais ! Après il y a des facteurs déclencheurs : une bonne idée, une rencontre, une rupture professionnelle ou un événement personnel ou encore, plus simplement, l’envie de faire pour soi ce que l’on a démontré savoir faire chez les autres…etc. Au-delà de cette envie, il faut bien entendu avoir de l’audace, afficher une conviction qui permet de dépasser le pragmatisme. Enfin, savoir s’entourer est assurément essentiel.

GPO Magazine : Voulez-vous dire qu’être entrepreneur est une qualité innée ?
C. P. : Je rencontre de nombreuses personnes qui me sollicitent pour avoir mon avis et des conseils sur leur projet. Une chose est certaine : au bout d’une heure de discussion je sais si la personne que j’ai en face de moi possède ou non les ingrédients personnels et le caractère pour se lancer. C’est tout un éco­système professionnel et familial, c’est une conjonction de forces, autour de soi, positives ou négatives, c’est l’environnement, c’est une culture, ou pas, de défiance ambiante. Selon que ces paramètres se conjuguent bien ou mal, cela peut couper les envies ou au contraire donner des ailes.

GPO Magazine : Un savoir-faire professionnel ne suffit donc pas pour être un bon chef d’entreprise…
C. P. : C’est exact. Et vous touchez là l’une des grandes missions du CJD. Nous formons beaucoup de jeunes entrepreneurs – et pas seulement des jeunes en âge - à la gestion et au management, car nous savons que dans ces domaines ils affichent souvent de sérieuses lacunes. Le métier de dirigeant est un métier multitâches. Le chef d’entreprise doit être un véritable couteau suisse.

GPO Magazine : Qu’est-ce que le CJD et quelle est sa philosophie ?
C. P. : Créé en 1938, le CJD est le plus ancien mouvement patronal français. À sa création, son premier slogan était « Mettre l’économie au service de l’Homme »… convenons que cela n’a pas pris une ride après plus de 75 années d’existence. N’étant sous la coupe d’aucune corporation professionnelle ou autre syndicat patronal, le CJD revendique une totale liberté de pensées, de positions et d’actions. Par ailleurs, nous estimons que l’entreprise a un rôle sociétal, qu’elle se place dans un environnement, dans une ville ou dans une région. Son dirigeant a besoin et doit établir des liens étroits avec son environnement.

GPO Magazine : Quelles sont les missions du CJD ?
C. P. : Le CJD repose sur cinq piliers. 1. Réfléchir pour améliorer l’entrepreneuriat ; 2. Expérimenter dans nos propres entreprises les idées que nous avons ; 3. Influencer les acteurs politiques et médiatiques sur tout ce que nous pensons être bon pour tous les entrepreneurs ; 4. Former, car peu de jeunes entrepreneurs ont toutes les connaissances requises pour être chef d’entreprise ; Enfin, 5. Développer toute une panoplie d’outils pour pérenniser nos entreprises.
L’entrepreneur qui adhère au CJD doit intégrer ces cinq piliers. Après, libre à lui de… « nager » parmi nous en fonction de ses appétences, de ses envies et de sa volonté d’engagement dans le mouvement.

GPO Magazine : Les adhérents du CJD ont-ils un profil type ?
C. P. : Non ! Nous croyons beaucoup à la diversité et nous sommes convaincus que le CJD peut faire changer et faire évoluer les entrepreneurs qui nous rejoignent. Ceux qui partent nous disent tous combien le CJD les a aidés en contribuant à la qualité de leur gestion et de leur management. L’adhérent au CJD est quelqu’un qui a conscience que ce sont les femmes et les hommes qui font la richesse de son entreprise. Il a donc le devoir de rendre son entreprise performante et durable, au plan économique et social.

GPO Magazine : Donnez-nous un exemple concret des services ou de l’assistance apportés à ses adhérents par le CJD ?
C. P. : Parmi les outils que nous avons développés, il y a ce que nous appelons le GAD, le Groupe d’Aide à la Décision, un outil au service de l’adhérent qui rencontre des difficultés… la banque qui ferme tous les robinets, la perte d’un gros client, un manque de visibilité pour une raison ou pour une autre…il y a mille raisons possibles. Que peut faire le dirigeant ? En parler avec son expert-comptable ? Avec son banquier ? Avec son conjoint ? Avec un ami ?…les possibilités ne sont pas légion et surtout il se sent seul dans un relationnel délicat.
Le GAD se réunit à la demande du JD (Jeune Dirigeant, ndlr). Durant trois heures, le Groupe développe une méthode de questionnement extrêmement structurée. Tout est abordé en confiance et sans tabou. À la sortie de cette réunion, le JD ressort avec un plan complet d’actions très précises. Ce GAD est un outil de « dingue », et ça marche !

GPO Magazine : Vous revendiquez votre liberté de ton et votre indépendance, au point même parfois d’être qualifié d’organisation iconoclaste. Appréciez-vous ce terme ?
C. P. : Le CJD n’est pas un syndicat. Il n’a aucun dogme. Il n’est lié à aucun lobby industriel, économique ou politique. Quand on a des propositions à faire, nous les formulons sans nous poser la question de savoir si cela va déranger. Notre seule motivation est la défense de nos 4.200 entreprises. Je vous confirme donc que j’aime plutôt le terme « iconoclaste ». L’histoire du CJD démontre que nous sommes capables de faire des propositions décapantes de nature à faire bouger les lignes. Nous entretenons d’excellentes relations avec le Medef ou la CGPME avec lesquels nous travaillons régulièrement. Mais si nous creusons un peu, on s’aperçoit que de nombreux chefs d’entreprise ne se sentent pas bien représentés par ces structures syndicales. C’est un fait.

GPO Magazine : Avez-vous en ce moment un cheval de bataille ?
C. P. : Il est de taille. C’est le projet de loi Hamon sur l’économie sociale et solidaire, notamment la partie qui vise à rendre obligatoire, au minimum deux mois avant, la communication aux salariés d’un projet de cession de l’entreprise. Cette idée n’a pu naître que dans le cerveau de quelqu’un qui n’a jamais mis les pieds dans une entreprise. C’est une lourde erreur, techniquement infaisable, qui va geler totalement les cessions. Mettre un projet de cession sur la place publique est la garantie de le faire capoter. Nous avons interrogé les dirigeants, les banquiers, les fournisseurs et bien entendu les salariés…tous rejettent l’idée.
Le monde des vendeurs et celui des repreneurs sont des mondes qui s’ignorent par défiance. Le paradoxe n’est qu’apparent. Les premiers n’ont pas envie de crier urbi et orbi qu’ils veulent céder, car ils se mettent alors en position de faiblesse. Les seconds n’ont pas plus envie de révéler leurs intentions de rachat, car ils se mettent alors en situation d’agression. Sur ce point le projet de loi Hamon est affligeant de par sa totale ignorance des conditions dans lesquelles se déroule un projet de ce type. C’est un déni de réalité. Si ce projet passe en l’état, ce sera une catastrophe.

GPO Magazine : Êtes-vous optimiste pour la France ?
C. P. : La France est l’un des pays au monde où l’on crée le plus grand nombre d’entreprises chaque année. Toutes ne survivent pas, mais le vrai problème est ailleurs : après dix ans d’existence, seules 5 % ont passé le seuil des 50 salariés. Nous avons donc un vrai problème de croissance de nos PME/PMI. La France demeure cependant une bonne terre d’accueil pour les entrepreneurs. Alors, c’est sûr, celui qui est ultra-libéral préférera toujours les USA ou le Royaume-Uni, mais n’oublions pas qu’au premier pépin de santé, il revient souvent se faire soigner en France (sourire, ndlr). L’État doit cependant admettre et comprendre qu’à un moment, il faut favoriser l’émergence des entrepreneurs qui se développent et qui seuls créent des milliers d’emplois. Arrêtons de taper toujours sur les mêmes !

GPO Magazine : Pourquoi avez-vous adhéré au CJD ?
C. P. : C’est à la suite d’une rencontre avec un adhérent. Installé à Colmar, où j’habite toujours, j’avais à l’époque une société de fournitures de bureau avec 12 salariés. Ça marchait bien mais j’étais finalement assez seul. Il m’a donc conseillé d’adhérer pour … m’oxygéner, ce que j’ai fait, non sans avoir passé un « test » pour savoir si j’étais un dirigeant en adéquation avec les valeurs du CJD. Alors que je les pensais inaccessibles, j’ai découvert les bienfaits de rencontrer d’autres chefs d’entreprise de ma ville ou de ma région. Je me suis aperçu que nous avions tous les mêmes problèmes et les mêmes préoccupations. Je me suis de plus en plus impliqué et un jour le Président local m’a demandé de faire partie du bureau. Voilà, c’était parti…
Aujourd’hui je ne suis plus dans la fourniture de bureau. J’ai créé et je dirige une société de conseil en stratégie et performance commerciales pour les PME, « Maven », que je développe en franchise. J’ai déjà 6 franchisés avec l’objectif d’en avoir 25 à l’horizon 2016.

GPO Magazine : Dans votre vie personnelle ou professionnelle, qu’est-ce qui est de nature à vous mettre de mauvaise humeur ?
C. P. : Au quotidien, c’est d’être mal reçu quelque part, dans un magasin, un restaurant ou ailleurs. Quand on sait comme moi la difficulté d’avoir des clients, je trouve cela indécent. Dans ma vie de Président du CJD, c’est la langue de bois et les personnes qui ne sont pas là pour de bonnes raisons. Là, je peux sortir de mes gonds. Il m’est déjà arrivé de quitter une réunion de très haut niveau pour ce type de motif. Il ne faut jamais se donner plus d’importance que ce qu’ont est. Autrement dit, il ne faut jamais tricher, il ne faut jamais mentir, voire se mentir sur une situation donnée. Il faut être soi-même. Toujours.

GPO Magazine : De quoi êtes-vous fier ?
C. P. : Je suis fier de mon épouse, de mes trois enfants, de ma famille…je suis fier de l’entreprise que je développe, je suis fier d’avoir été élu Président du CJD car j’aime contribuer à la diffusion de ses valeurs et j’aime servir.

GPO Magazine : Une fierté un peu idyllique non ? N’est-ce pas un peu langue de bois ?...
C. P. : Je vais vous rassurer ! (sourire, ndlr) Lorsque j’étais jeune, je n’avais aucune idée de ce que je voulais faire. J’ai fait des études un peu chaotiques, j’ai mis cinq ans à avoir mon Bac, j’ai commencé un IUT que j’ai quitté…puis j’ai vendu des photo­copieurs….j’ai rencontré des difficultés finan­cières...bref, ce n’était pas terrible ! Puis un jour j’ai ressenti cette envie d’entreprendre dont je parlais au début de notre entretien. J’avais donc en moi cet ADN d’entrepreneur, mais il était en sommeil. Alors, oui, je suis fier de mon parcours. Il est la démonstration que, malgré des débuts aléatoires et difficiles, on peut être entrepreneur. Une condition : en avoir l’envie chevillée au corps.

GPO Magazine : Lorsque les choses ne vont pas comme vous les souhaiteriez, avez-vous un refuge ?
C. P. : Echanger, parler, se confier. J’ai toujours constaté que parler était la base et le premier pas de toute solution.

GPO Magazine : Votre mandat ne dure que deux ans. Un Président a-t-il le temps d’agir dans un laps de temps aussi court ?
C. P. : Le Président du CJD n’est pas élu pour faire la révolution. Il est d’abord et avant tout le garant de l’histoire et des valeurs du CJD. Un Président apporte généralement une idée qu’il développe pendant son mandat. Cela a été par exemple l’Esprit de conquête ou la Fragilité de l’entrepreneur… moi c’est l’Audace et l’Agilité, dont nous avons tant besoin en France. Mon ambition est de donner envie à des dirigeants de nous rejoindre, en leur faisant prendre conscience que le CJD n’est pas une organisation patronale tout à fait comme les autres.

Propos recueillis en entretien par Philippe DERMAGNE
                                    

Le CJD en chiffres

• Création : 1938
• Nombre d’adhérents : 4 200
• Age moyen : 39 ans
• Présence nationale : 17 régions, 110 associations locales
• Présence internationale : Algérie, Belgique, Bénin, Cameroun, Maroc, Mauritanie, Monaco, Québec, République tchèque, Sénégal, Tunisie
• Correspondants : Australie, Canada, Chili, Chine, Finlande, Grande-Bretagne, Pologne, Espagne, Suède, États-Unis (Chicago, New-York, San-Francisco), Vietnam

 

 

 

Lu 11715 fois Dernière modification le lundi, 04 juin 2018 12:37
Philippe Dermagne

En 1980, il crée sa propre société, une agence de publicité dédiée au BtoB, à la communication par l’écrit et à la motivation des forces de ventes. En 1995, il fonde l’une des toute premières agences multimédia française, en mettant en place un développement international en Suède, UK et Brésil. Depuis 2007, il est un journaliste qui présente la particularité d’avoir plus de 30 années d’expérience en tant qu’entrepreneur.
Ses terrains de prédilections : les RH, le développement durable, la gestion de flotte automobile. Son second métier : l’animation de colloques, tribunes et grands séminaires d’entreprise.

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