Windows Onward

Les Seniors, nouvel eldorado pour les entreprises ?

Évaluer cet élément
(1 Vote)

Digitalisation, robotisation, intelligence artificielle, l’ère de l’automatisation, de la simplification des process et de nouveaux modes d’interactions conduit naturellement à une évolution des métiers et des besoins en compétences. Le site de Pôle Emploi affirme même que « D’ici à 2030, les Soft Skills seront au cœur des stratégies de recrutement des entreprises »1.

Le taux d’emploi des + 60 ans est de 35,5 %, ce qui place la France dans le bas du classement des pays de l’Union européenne. De plus, avec un volume de 50 ans et + représentant 28% de la demande d’emploi, en progression constante sur ces dernières années, les seniors sont les premières victimes du chômage de longue, voire de très longue durée !

Pourtant, majoritairement détenteurs de ces fameuses compétences douces qui ont l’avenir et le vent en poupe, les seniors devraient plus que jamais être courtisés par les entreprises. Or, à ce jour, ce n’est pas réellement le cas, et ce paradoxe bien français mérite quelques réflexions...

La France est le mauvais élève européen sur la question de l’emploi des seniors

La France hérite de sa politique menée jusque dans les années 2000, durant lesquelles l’objectif majeur était de ‘sortir’ les seniors de l’entreprise, imaginant qu’ils avaient bien mérité de s’arrêter, au risque pour les restants de s’avérer fatigués, peu productifs et trop chers, assertions par ailleurs mises à mal par de nombreuses études. L'idée était alors de faire de la place aux jeunes...

Depuis lors, les gouvernements successifs ont quelque peu réarmé les politiques en faveur des seniors et la France a fait de nets progrès pour les 50-55 ans, mais pas au-delà. Ces dernières années connaîtraient-elles un réel sursaut sur la question ? A l’évidence selon les différents acteurs publics et privés, et tous s’en félicitent. Cela n’a pourtant pas empêché nombre d’entreprises de faire partir de manière anticipée leurs + de 55 ans (6 détiennent à elles seules le record de 4500 départs entre 2020 et 2022).

Au lieu de pousser les seniors vers la sortie, ne vaudrait-il pas mieux miser sur la continuité de leur carrière. Dans ce contexte, le rapport Bellon, remis au gouvernement en janvier 2020, propose plusieurs mesures en ce sens.

Mais, au-delà des outils proposés et mis en place pour certains, par ailleurs extrêmement pertinents, il semble préalablement essentiel de prendre conscience des atouts spécifiques des seniors, de reconsidérer la question de leur coût souvent pressenti comme élevé, et aussi de changer la représentation que l’on a de ces profils expérimentés.

Des atouts reconnus par le plus grand nombre

L’étude ‘Pratiques d’entreprises en faveur de l’emploi des seniors’, menée par Oasys Consultants et Syndex, s’avérait déjà en 2017 particulièrement édifiante sur le sujet :

  • 80 % des DG et DRH interrogés disent qu’au regard de l’ensemble des salariés, les seniors sont plus fiables et plus autonomes.
  • 73% affirment qu’ils sont plus assidus au travail.
  • 65% précisent qu’ils sont plus disponibles.
  • 92 % soulignent leur appétence à transmettre leurs compétences.

Dans une très large majorité, ils s’accordent par ailleurs sur le fait qu’ils ne sont pas moins motivés, pas moins productifs et pas moins compétents. La moitié des DG et DRH vont même jusqu’à affirmer qu’ils ont une bonne capacité d’adaptation au changement. Enfin, tous soulignent qu’ils détiennent la mémoire de l’entreprise, et facilitent l’intégration des jeunes. C’est sans appel !

Malgré cela, un déficit d’image évident

Si d’une façon générale, et comme nous l’avons vu précédemment, tous s’accordent à leur reconnaître de précieuses qualités et compétences professionnelles, ils sont peu recrutés pour autant, et les accords de gestion des emplois et des parcours professionnels facilitent trop souvent leur sortie de l’entreprise. Il est urgent de changer notre regard sur ces professionnels qui sont non seulement contributifs et rentables à l’entreprise, mais également essentiels pour pérenniser notre système de retraite.

Employer des Seniors

Et souvent la crainte d’un coût élevé

Question d’image certainement, car le recruteur associe encore trop souvent ces professionnels expérimentés à des professionnels dépassés. Et dans une société de jeunisme, l’âge ne véhicule pas les vertus qu’il porte. Les préjugés ont la vie dure. Également en matière de coût. Il est vrai que statistiquement, un salarié expérimenté perçoit une rémunération plus élevée que celle d’un profil junior. Certains affirment, qu’en regard de leur productivité, les jeunes seraient plutôt sous-rémunérés que leurs aînés qui eux-mêmes seraient surrémunérés. Sans entrer dans ces considérations qui amèneraient à se poser la question de lisser les amplitudes de rémunération, nous pourrions proposer un éclairage sous 3 angles.

Tout d’abord, plutôt que de se référer uniquement au montant qui figure sur leur bulletin de salaire, pourquoi ne pas adopter une approche de type P&L (Profit and Loss), afin non pas de raisonner en termes de coût, mais de rapport coût/rentabilité.

A la question de la productivité qui s’évalue facilement, par exemple à partir d’une feuille d’objectifs, il sera alors intéressant d’inclure plusieurs paramètres d’appréciation, et notamment : le faible turn-over de ces salariés expérimentés, qui permet d’éviter des coûts de recrutement souvent onéreux, leur capacité à être immédiatement opérationnel sans période d’adaptation, leur faible taux d’absentéisme, etc. En adoptant ce type d’analyse, nous pourrions avoir quelques bonnes surprises !

Ensuite, nous pourrions élever un peu le regard et dépasser le sujet de l’individu pour parler de dynamique collective. Le travail en équipe augmente le plaisir, la motivation et la performance et diminue l’absentéisme. La mixité qui rassemble des profils juniors, des jeunes expérimentés et des seniors est un gage de partage et de développement des compétences et donc d’accroissement de la productivité !

Et, à l’évidence, le senior a toute sa place au sein des équipes auxquelles il apporte son expertise précieuse et favorise une excellente coopération intergénérationnelle (sur ce dernier point, dans l’étude ‘Pratiques d’entreprises en faveur de l’emploi des seniors’ par Oasys Consultant et Syndex, 82 % de DRH et DG interrogés l’affirment !)

Finalement, n’abordons pas la question par le coût du senior, mais plutôt par celui de sa contribution à la productivité de l’entreprise.

Un vrai parcours du combattant pour celles et ceux qui sont en recherche active d’emploi

A l’évidence donc, les seniors possèdent non seulement les compétences attendues par les entreprises, mais ils s’avèrent également productifs et donc rentables. Et pourtant, ils sont encore trop peu recrutés. Selon le baromètre réalisé par le Défenseur des droits et l'OIT (Organisation internationale du travail), l’âge constituerait la première discrimination à l’embauche. Et la durée d’inscription au chômage s’avère 2 fois plus élevée que la moyenne ‘tous âges confondus’ (DARES - données CVS-CJO pour les catégories A, B et C).

De fait, le parcours de recherche d’un emploi pour un senior s’apparente à un véritable parcours du combattant. Et les difficultés commencent dès la candidature, avec un traitement automatisé par les logiciels de type ATS - Applicant Tracking System, qui éliminent impitoyablement toute offre de service qui ‘sortirait’ du cadre préétabli par le recruteur, et rarement en faveur de l’âge mûr ! Ce premier barrage franchi, vient ensuite l’entretien de recrutement, et trop souvent décriée cette posture haute du recruteur qui se nourrit d’une suspicion naturelle à l’égard de son aîné : trop longtemps au chômage, cela cache nécessairement quelque chose, il faut donc enquêter et trouver la faille.

Ensuite, viennent les questions et les doutes sur la motivation, la disponibilité, l’adaptabilité, la capacité à se remettre en question, à être managé, sans occulter en toile de fond la question du coût toujours trop élevé ! Et finalement le choix du recruteur, à en croire de si nombreux chômeurs seniors qui l’ont vécu, se porte finalement très souvent sur un autre profil, plus jeune, moins cher. Il n’y a plus qu’à se remotiver, repartir du bon pied, et se préparer à un autre entretien, en espérant qu’il ne se transforme pas lui aussi en autre duel et autre déception, et pendant ce temps-là, le temps passe …

Fort heureusement, il existe des associations et des initiatives qui prennent conscience de ce calvaire du recrutement pour des chômeurs coupables d’être trop expérimentés, ou d’avoir les tempes grisonnantes.

L’entreprise éphémère, une solution pour accélérer le retour à l’emploi des seniors

« Si les personnes en recherche d’emploi n’étaient plus des demandeurs d’emplois mais des acteurs de l’emploi » : l’entreprise éphémère pour l’emploi part de ce postulat et propose à une cinquantaine de demandeurs d’emploi de 45 ans et + de se fédérer et de s’organiser comme une entreprise. La feuille de route de l’entreprise est d’aller à la rencontre du marché caché de l’emploi et de créer des opportunités pour les participants.

Devenus « associés » de l’entreprise, les demandeurs d’emploi assurent une mission de 7 semaines au sein de cette entreprise éphémère. Ils se votent un nom d’entreprise, se dessinent un logo, se font faire des cartes de visites et des plaquettes pour aller à la rencontre de ce marché caché où les robots de l’intelligence artificielle agissent moins et se mettent en mode entreprise après une première semaine de découverte des projets professionnels des uns et des autres.

Pour être efficace, l’Entreprise Éphémère pour l’Emploi s’organise au quotidien en 5 services opérationnels :

  • Le service « face à face », en charge de la prospection terrain, va à la rencontre des entreprises sur le bassin d’emploi
  • Le « centre d’appels » contacte les entreprises par téléphone, pour recueillir leurs besoins en recrutement
  • Le service « Web » met en ligne les offres détectées par le centre d’appels et le face à face sur une plateforme digitale dédiée au projet, et en lien avec le service RH, pousse les offres d’emploi vers les associés
  • Le service « Ressources Humaines » travaille les CV, et surtout entraîne et prépare aux entretiens de recrutement
  • Et le service « Communication » donne de la résonnance médiatique à l’entreprise éphémère et propose aux recruteurs de participer aux job dating organisés quotidiennement dans l’entreprise pour présenter leurs opportunités d’emplois.

Pendant 7 semaines, les associés vont avancer ensemble et s’entraider dans leurs recherches d’emploi, sous l’œil bienveillant de 3 coachs.

Les résultats sont très encourageants, 30 à 45% des participants en moyenne sont en emploi dans le mois qui suit la fermeture de l’entreprise éphémère. Dans les 6 mois qui suivent la sortie, ce sont 55 à 70% en moyenne des participants2 qui ont repris un emploi, qui dans la plupart des cas sera un CDI ou CDD de 6 mois.

L’entreprise éphémère pour l’emploi propose donc une approche novatrice de la recherche d’emploi en s’appuyant sur la force du collectif et de l’entraide, valorisant les talents des uns et des autres, renforçant la capacité de rebond de chacun face au marché du travail, développant le réseau tellement utile lorsqu’on recherche en emploi après 45 ans, et travaillant les Soft Skills tant demandés par les recruteurs.

Ce projet contribue à donner une image dynamique du senior en recherche d’emploi, se prenant en main, aussi habile en digital que les jeunes générations, ouvert aux opportunités et motivé à reprendre rapidement un poste. Ce sont autant de points d’appui dont les séniors en recherche d’emploi ont besoin pour rebondir.

Parallèlement, le projet met en lumière via la médiatisation sur les réseaux sociaux des entreprises inclusives, ouvertes à des méthodes de recrutement innovantes, différentes, et prêtes à s’ouvrir à de belles rencontres.

L’entreprise éphémère s’avère être un concept original au service du territoire, des organisations et des demandeurs d’emploi en contribuant à la lutte contre les difficultés de recrutement des entreprises, tout en accélérant le retour à l’emploi des demandeurs d’emploi seniors.

Par Patrice de Broissia, Associé, Directeur grands projets d’Oasys & Cie et Sandrine Gineste, directrice Associée du 30 Fab


1 Source : www.pole-emploi.org/dici-a-2030-les-soft-skills-seront-au-coeur-des-strategies-de-recrutement-des-entreprises.html
2 Ces résultats s’appuient sur la participation de près de 900 demandeurs d’emploi dont 70% de demandeurs d’emploi de longue durée, sur 20 entreprises mises en œuvre à l’échelle nationale

Lu 430 fois Dernière modification le mercredi, 15 novembre 2023 13:45
Nos contributeurs

Nos contributeurs vous proposent des tribunes ou des dossiers rédigées en exclusivité pour notre média. Toutes les thématiques ont été au préalable validées par le service Rédaction qui évalue la pertinence du sujet, l’adéquation avec les attentes de nos lecteurs et la qualité du contenu. Pour toute suggestion de tribune, n’hésitez pas à envoyer vos thématiques pour validation à veronique.benard@gpomag.fr

Annonces

Windows Onward

Le magazine digital

Inscrivez-vous à notre édition digitale pour feuilleter gratuitement le prochain numéro

inscrit.png   

Paru le 4 mars 2024
GPO Magazine N°113
Demandez votre exemplaire au service Vente au numéro

Lire l'extrait GPO 113.png

Paru le 27 novembre 2023
Édition Spéciale Transformation digitale
Recevez-le dès aujourd'hui !
Abonnez-vous à l'année en cliquant ici

Vignette Lire un extrait HS Transfo Digitale.png

Livres Blanc et E-book

Le Système d'Exploitation Hybride Windows 11 de Microsoft Booste la Productivité et la Sécurité en Entreprise
Microsoft a récemment dévoilé Windows 11, son dernier système d'exploitation, qui s'adapte parfaitement au mode…
Quelle stratégie pour établir une relation commerciale durable en Allemagne : un guide pour les dirigeants d’entreprises françaises
L'Allemagne, premier partenaire commercial de la France, demeure un marché d'exportation incontournable pour les entreprises…
Comment favoriser sa transition vers une économie mondiale durable ?
La CSRD contribue à l’objectif de l’Union européenne de promouvoir une économie durable et responsable,…
Plus de livres blanc

Webinaires

Facturation Électronique 2024 : une opportunité de performer pour les entreprises !
Une enquête de Wax Digital a révélé que 70 % des professionnels de la comptabilité…
Comment faire prospérer son entreprise dans la conjoncture actuelle ?
Pour accompagner les entreprises au plus près de leurs préoccupations, les experts de KPMG, Crédit…
Comment aborder la fin du « quoi qu’il en coûte » ?
Symboles du « quoi qu'il en coûte » comme réponse au Covid-19, les prêts garantis…
Plus de webinaires

Services aux entreprises

è Découvrez le réel impact de Windows 11 Professionnel

Grâce à la sécurité activée par défaut, les entreprises du monde entier prennent des initiatives plus audacieuses et des décisions plus rapides.

 
è Facturation électronique 2026

Un guide détaillé sur les étapes clés pour réussir son passage à la facturation électronique 2026 et franchir le pas de la dmatérialisation, avec tous les bénéfices qui l'accompagnent.

LB Facturation electronique 2026 Docuware.png

 

è  BUSINESS FRANCE : Établir des relations commerciales en l'Allemagne

L'Allemagne est le premier partenaire commercial de la France et représente le plus fort potentiel à l'export de la France à horizon 2025. Ce marché à la fois passionnant et exigeant mérite d'adopter une stratégie durable pour établir une relation commerciale sur le long terme. Tel est l'objectif de ce livre blanc de 64 pages intitulé "Quelle stratégie pour établir une relation commerciale avec l'Allemagne", proposé par Business France et ses partenaires de la Team France, et téléchargeable gracieusement.

 Couverture Livre Blanc Business France Allemagne.png

 
è  SYLOB : ERP pour l'industrie

Anticiper les évolutions industrielles et se projeter dans l'usine intelligente du futur, tels sont les objectifs visés par ce guide pratique de 20 pages à destination des PME intitulé "Industrie 4.0 & ERP", proposé par Sylob et téléchargeable gracieusement.

Couv Sylob CTA.png

 

 

GPO Magazine

GPO Magazine, pour Gérer, Prévoir et Optimiser les ressources de l'entreprise est un magazine d'aide à la décision bimestriel, axé sur l'optimisation de la gestion d'entreprise, pour concrètement guider ses lecteurs dirigeants dans leurs réflexions stratégiques, leurs démarches opérationnelles, la gestion de leurs droits et dans le choix de leurs partenaires.

Une ligne éditoriale concrète et pertinente qui conjugue tendances, cas concrèts et témoignages, dossiers d'analyse, dossiers marchés, dossiers métiers, focus, point de droit, point international, point fiscal. Plus des " Avis d'Experts ".

Contactez-nous

Nos autres sites d'information

Twitter - Derniers posts