IA : un « Game Changer »

D’après l’étude mondiale ICEO, activité de LHH qui accompagne les dirigeants dans leur stratégie de carrière, publiée en janvier 2024 et réalisée auprès de 1200 dirigeants, l’IA constitue leur 1ère préoccupation devant l’incertitude économique. Plus de 26 % des dirigeants interrogés envisagent ‘la transformation numérique » comme le premier défi interne pour l’entreprise (processus internes, organisation, gestion des talents) et pour 29% « la perturbation technologique y compris l’IA » est également la principale source de défis externes : transformation des marchés, évolution des concurrents, des nouvelles offres à positionner.

Ce premier constat est conforté par l’étude publiée par le groupe Adecco en avril 2024, elle aussi mondiale et réalisée auprès de 2000 dirigeants : l'intelligence artificielle est, pour 61% des leaders, perçue comme un « game changer », donc une opportunité. Une appréciation partagée également par 62% des salariés qui voient dans l’IA un facteur d'évolution positif de leur rôle, de leurs compétences, de leur carrière. Cette perception fait directement écho à la dernière enquête de l’OCDE « Avenir de l’emploi » : 63% des travailleurs utilisant l’IA dans leur quotidien se sentent plus épanouis.

Comprendre et agir

Pour autant, il est urgent d’agir face à une digitalisation des entreprises très modeste : seuls 11 % des dirigeants sondés lors de l’enquête Adecco affirment avoir réalisé des progrès significatifs dans ce domaine au cours des dernières années.

Le sujet des impacts de l’IA sur les réalités Business reste encore insuffisamment compris et les avantages mal appréciés. Si ChatGPT est déjà pratiqué par des utilisateurs qui se comptent en millions pour des usages tactiques, plus de la moitié des CEO et CFO de l’enquête Adecco se déclarent encore peu convaincus par les bénéfices que l’IA peut apporter dans leurs orientations stratégiques. En conséquence, on observe des organisations pas suffisamment adaptées, des équipes mal formées et des initiatives qui, quand elles existent, restent isolées et peu visibles.

Au-delà, l’IA représente aussi une problématique sociale. L'OCDE confirme que, dans tous les pays, une majorité d’emplois sera impactée, de nouvelles compétences requises, et pas uniquement dans l’expertise de la data. De nouveaux besoins de formation vont concerner une grande diversité de profils, quel que soit leur niveau de qualification ou leur séniorité.

L’automatisation d’un nombre exponentiel de tâches pourrait induire une modification radicale de l’emploi et de l’employabilité dès lors que celle-ci n’est plus liée aux expertises d’hier (intégrées par les machines) mais à de nouvelles compétences à acquérir (dont celles liées à l’usage de la data ou du numérique). On peut s’inquiéter de voir les entreprises et leurs dirigeants plus enclins à recruter de nouvelles compétences plutôt qu’à investir dans la formation. Dans l’étude réalisée par le groupe Adecco, 64 % d’entre eux privilégient ainsi le recrutement de profils déjà formés à l’IA.

Pas d’IA sans IE – Intelligence Emotionnelle et relationnelle !

Un exemple dans les métiers du conseil, et en particulier dans l’appui à la recherche d'emploi, un acteur comme LHH innove et utilise l’IA pour automatiser certaines tâches comme la réalisation d’un CV, la préparation aux entretiens. Ainsi, ceci positionne le consultant dans son rôle essentiel, celui d’apporter toute son intelligence humaine émotionnelle et relationnelle à un salarié en recherche d’emploi et socialement fragilisé.

De la même manière, il est important de souligner que les leaders, renforcés dans leur prise de décision grâce à l'IA, devront démontrer de nouvelles qualités telles que l’agilité, l’adaptabilité et la capacité à développer un réseau d’influence. Il s’agit aussi pour les dirigeants de créer de la valeur et ceci passe par la capacité d’engager l’ensemble des parties prenantes. La qualité du réseau d’influence et la communication sont des compétences dans lesquelles le dirigeant doit exceller encore plus.

Pour intégrer l’IA comme vecteur de développement, l'ampleur de la transformation nécessite une approche structurée appuyée par un investissement constant ; et dans la durée les dirigeants peuvent suivre 5 préceptes pragmatiques :

• Commencer la transformation par le top management : les équipes de direction doivent impulser une stratégie d’Intelligence Artificielle
• Incarner un nouveau leadership, être rôle modèle en termes d’agilité, adaptabilité, perméabilité au changement et au numérique
• Penser l’organisation, les processus, les ressources, les investissements à réaliser sur un plan technologique et aussi sur le plan de formation pour s’appuyer sur les bonnes compétences développées en interne
• Communiquer et promouvoir une culture qui fait le lien entre l'ambition de l'entreprise, les opportunités au travers de l'intelligence artificielle et la création de valeur pour l'ensemble des parties prenantes
• Valoriser la data et piloter le change avec l’IA

L’IA apporte son lot d’opportunités et il est urgent d’y sensibiliser l’ensemble des équipes dirigeantes. Ceci appelle à la responsabilité sociale des entreprises ainsi qu’à celle des pouvoirs publics. La formation impose un investissement d’avenir ; à commencer par celle des dirigeants pour réussir leur mandat et penser la transformation de leur organisation.

Une certitude : il n’y aura pas de révolution numérique éthique et maîtrisée sans intelligence humaine. On parle de révolution. Puissent ces progrès technologiques être au service du mieux (être, travailler, vivre).

Par Anne-Caroline Moeller, Directrice de l’Accompagnement des Dirigeants chez LHH, Directrice Générale LHH ICEO, membre du Comex LHH France

Sources
• Étude Adecco, avril 2024 : www.groupe-adecco.fr/articles/intelligence-artificielle-mefiants-66-des-dirigeants-preferent-recruter-plutot-que-de-former
• Enquête ICEO, décembre 2023
• « Avenir de l’emploi » de l’OCDE, juillet 2023 : www.oecd.org/perspectives-de-l-emploi/2023