GPO Magazine : Le groupe Prévost, c’est une aventure familiale et industrielle, pouvez-vous nous présenter ce groupe ?

Sébastien Prévost : L’histoire de Prévost Industries a commencé en 1953, dans les Deux-Sèvres, lorsque Edmond Davignac s’est intéressé aux activités industrielles en vogue telles que les huisseries métalliques. Il va créer EDAC et il mise sur le travail de l’acier à froid, grâce à une technique de profilage. Edmond Davignac va ensuite travailler avec son gendre, Jacques Prévost qui va intégrer au fur et à mesure ses enfants. Je suis la 4ème génération à la tête de ce groupe.

À la fin des années 70, le choc pétrolier les oblige à trouver des idées afin de diversifier leurs produits. C’est alors qu’une nouvelle société voit le jour en 1983 : SPP (Société de Profilage du Poitou) avec toujours la technique de profilage à froid (création de piquets de vignes et d’ossatures pour plaques de plâtre).

Le groupe Prévost Industries fédère plusieurs entreprises industrielles, plutôt spécialisées dans les produits du second œuvre du bâtiment. Ces sociétés sont regroupées autour de 2 grands pôles : le groupe DEYA et PSI groupe. Le groupe DEYA est un spécialiste de blocs-portes, métalliques et bois, de fabrication de plateaux d’échafaudage et à travers la marque KAZED, de la fabrication de façades et de l’aménagement de placards. Le groupe PSI (Profils et Systèmes Industries) qui fédère plusieurs sociétés industrielles regroupées autour de 2 marques principales (SPP et PAI), est spécialisé dans la fabrication de systèmes d’ossatures métalliques pour poser des plaques de plâtre en plafond, en cloison, en doublage thermo-acoustique pour les murs.

L’ensemble de nos sites est regroupé en très grande majorité en France mais nous avons également 2 sites en Espagne, au sud de Madrid.

GPO Magazine : Quels sont les piliers de votre entreprise ?

Sébastien Prévost : Notre groupe a 70 ans cette année et quatre générations se sont succédées pour faire grandir et rayonner notre activité. Notre entreprise est donc restée familiale : il s’agit d’une ETI familiale. Nos ETI ne sont pas assez nombreuses en France, contrairement à leur nombre croissant en Allemagne, en Italie du Nord ou en Angleterre.

L’indépendance et la défense d’un modèle patrimonial font parties de nos fondations. Et cela nous donne une force, une spécificité qui peuvent être appréciées d’ailleurs par nos clients, nos fournisseurs, nos collaborateurs, avec une certaine liberté de parole.

Nous prônons la culture de l’excellence : notre entreprise s’est développée à travers des rencontres d’ingénieurs, de mécaniciens qui ont développé les techniques du profilage. Et cela fait appel à des compétences, à des personnalités issues pour certaines, de la compétition, qui se sont battues et ont développé une forme d’émulation entre elles pour aller plus vite, plus loin. La recherche de la performance est également une valeur essentielle qui nous a toujours guidée.

Nos clients sont au centre de nos préoccupations et nous avons à cœur de les accompagner et de les guider à chaque étape, du traitement informatique de la commande jusqu’à la livraison.

Bien entendu, nous effectuons un travail d’équipe et nos collaborateurs font parties intégrantes de la réussite de notre entreprise.

Nous n’avons pas encore décliné de charte de valeurs, de charte RSE mais si nous devions le faire, je mettrais l’humilité en tête d’affiche.

GPO Magazine : Quelle est la stratégie gagnante pour votre groupe ?

Sébastien Prévost : Notre stratégie s’appuie sur des piliers tels que la recherche de l’indépendance financière avec la défense du modèle patrimonial, l’excellence industrielle et la recherche de la perfection pour nos clients. Et ces valeurs guident nos actions.

Nous ne sommes pas pressés d’avaler tout le monde, ce qui ne nous interdit pas de faire de la croissance externe car plusieurs de nos sociétés sont issus de rachats (derniers rachats en 2012 et 2013, rachat de 2 sociétés de machines-outils qui étaient des fournisseurs historiques). Nous faisons également de la croissance organique (en 2019, nous avons mis en route une usine de fabrication de plaques de plâtre en Espagne à laquelle on s’est associés avec des espagnols).

De telles valeurs ne nous poussent pas à l’inaction mais à la réflexion et à la défense de notre modèle patrimonial. Nous veillons à ce que notre équilibre capitalistique, patrimonial et d’indépendance financière ne soit pas mis en danger.

Enfin, la recherche de l’excellence nous pousse à investir de manière constante dans nos outils industriels (entretien et renouvellement de nos machines et bâtiments). Ces dernières années, l’apparition de la variable environnementale, de la responsabilité sociétale des entreprises et l’explosion des coûts énergétiques nous a poussés à diriger nos investissements vers des économies d’énergie.

De plus, notre groupe est attaché depuis longtemps à l’innovation et nous avons un bureau d’études dédiée à la recherche et au développement de nos produits.

GPO Magazine : Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui souhaiterait créer sa propre entreprise ?

Sébastien Prévost : En ce qui me concerne, je n’ai pas créé mon entreprise. Aujourd’hui, je constate que je suis un peu en contradiction avec l’air du temps. En effet, on parle beaucoup de Start-up, de licornes, de levée de capitaux et l’on sent qu’il y a une espèce d’effervescence à aller très vite. Bien entendu, lorsque l’on créé une entreprise, il faut être entreprenant dans la recherche de capitaux mais souvent je suis en opposition avec cette rapidité recherchée par certains Startupers.

Pour créer une entreprise, on n’a pas besoin de regarder trop le long terme. Cependant, pour la pérenniser, il faut savoir être véloce lorsqu’il le faut mais il convient parfois de prendre une inspiration et laisser le temps de poser sa réflexion avant d’agir. Souvent, l’action mène à la réflexion et à mon sens, c’est plutôt la réflexion qui doit mener à l’action.

À l’évidence, il faut de l’audace et beaucoup de travail pour créer une entreprise mais il faut aussi savoir patienter, ne pas se brûler les ailes en faisant tout trop vite. On peut commettre des erreurs et on apprend de ses erreurs, mais il faut savoir s’arrêter pour les analyser.

Il faut être bien entouré, avoir une forme de stabilité dans sa vie professionnelle et privée afin d’avoir une forme de recul sur les choses sans brûler les étapes intermédiaires.

Enfin, il faut savoir se reposer sur des fondamentaux et ne pas être forcément dans la course. Créer une entreprise, c’est d’ailleurs plus une course de fond qu’un sprint. À notre époque, l’environnement est plus compliqué car il y a une lenteur administrative, juridique et cela nécessite de prendre plus de recul, de réflexion afin d’éviter de faire de grosses erreurs qui peuvent coûter très cher.

GPO Magazine : Comment voyez-vous l’avenir du groupe Prévost dans quelques années ?

Sébastien Prévost : Si l’on se projette dans 5 ou 10 ans, nous aurons toujours à cœur de rester indépendant et de continuer à défendre notre modèle patrimonial. Nous chercherons à maintenir les piliers de notre groupe telle que la quête de l’excellence, de la performance à travers notamment l’innovation.

Nous allons poursuivre notre développement en cherchant à améliorer constamment la qualité de nos produits afin d’apporter de la valeur ajoutée à nos clients.

Rester indépendant et continuer à investir dans de l’innovation et de la performance machine afin de continuer à renforcer nos positions sur les marchés me semble être déjà un challenge en soi à l’époque actuelle. Et cela me semble à la fois ambitieux et raisonnable.

Par ailleurs, nous allons continuer sans relâche nos investissements dans la réduction de la consommation énergétique : nous allons de plus en plus vers de la sobriété énergétique (par exemple : approvisionnement de nos matières par le rail afin de diminuer encore plus l’impact CO2).