La Cour de cassation confirme la distinction classique entre titre et finance
Dans le cadre du régime de la communauté réduite aux acquêts, si l’un des époux acquiert des parts sociales d’une société civile immobilière, l’autre époux peut, en vertu de l’article 1832-2 alinéa 3 du Code civil, revendiquer la qualité d’associé de cette même société pour la moitié des parts souscrites. Dans ce cas, lesdites parts sociales ne sont pas détenues en indivision par les époux mais chacun est titulaire, en propre, de la moitié des parts acquises via la communauté.
Cette règle a été rappelée par la Cour de cassation qui a également précisé les modalités de l’articulation entre le droit des régimes matrimoniaux et le droit des sociétés, en cas de transmission, par l’un des époux, de parts d’une société civile après la dissolution de la communauté.
En l’espèce, un époux et sa femme détenaient la majorité des parts d’une société civile immobilière (870 parts chacun), dont le reliquat était détenu par l’un de leurs sept enfants. Suite au décès de son époux et avant le partage des biens de la communauté, l’épouse a fait donation de ses 870 parts à son fils associé. Ses autres enfants, estimant que les parts transmises étaient tombées dans l’indivision successorale, ont mis en cause la responsabilité du notaire en lui reprochant de ne pas avoir cherché à savoir si l’épouse pouvait valablement procéder à ladite donation sans obtenir préalablement leur accord.
La Cour a rejeté leur demande en rappelant la distinction fondamentale entre le titre et la finance. En effet, lors de la dissolution de la communauté, les biens du défunt entrent dans une indivision dans laquelle les héritiers ont des droits. Or, la qualité d’associé attachée aux parts sociales n’est pas transmise aux membres de l’indivision, seule la valeur desdites parts va figurer à l’actif de l’indivision successorale.
La Cour avait déjà rappelé que lorsqu’un seul époux a la qualité d’associé, les parts sociales acquises au moyen de biens communs pendant la durée du mariage n’entrent en communauté que pour leur valeur et non pour le titre en lui-même (Cass. 1ère civ. 4 juillet 2012 n°11-13.384). Il semble désormais que cette distinction soit appliquée également lorsque les deux époux ont obtenu la qualité d’associé en cours de communauté, quelle que soit le mode d’acquisition de la qualité d’associé : n’étant pas tombées en nature dans l’indivision post-communautaire, les 870 parts détenues par l’épouse pouvaient, en toute logique, être transmises par cette dernière sans recueillir l’accord des coindivisaires.
Les parts sociales ne font que matérialiser les droits, de nature notamment patrimoniale, détenus par l’associé dans la société. A la dissolution de la communauté, l’épouse possède le titre de ses parts et les héritiers n’ont aucun droit sur ce titre. En revanche, la valeur des parts relève de la masse commune et tombe dans l’indivision post-communautaire au décès de l’époux. Les parts détenues et transmises par l’épouse étaient communes en ce qui concerne leur valeur, le titre de ses parts lui restant propre. L’aspect non patrimonial d’un bien ne peut donc pas tomber en communauté et seule la finance, partie évaluable pécuniairement, y est inscrite à la dissolution de la communauté.
Cette solution est transposable aux sociétés dont les parts ne sont pas négociables (SARL, SCS, SNC) et pour tout type de transmission, à titre gracieux ou onéreux.
Par Marie-Hélène Perin
Avocat, Département droit des sociétés Cornet Vincent Ségurel
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