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Risque Psychosociaux: arrêtons de jouer avec les maux. Par David Moisson – Psychologue du travail – Consultant RPS - Cabinet Anveol, conseil en RH

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L’approche RPS (Risques Psychosociaux), qui s'est aujourd'hui imposée dans le monde de la gestion de la santé psychique au travail, a engendré un certain nombre de pratiques, dont la pertinence et l’utilité sont sujettes à caution.

Le vocabulaire employé par les tenants de cette approche - selon lequel les RPS seraient des "maladies" qu'il faudrait "diagnostiquer" pour les "soigner", n’est pas étranger à cet état de fait.

L’utilisation systématisée de la métaphore médicale véhicule certains sous-entendus, dont le décryptage peut permettre de mieux saisir les faiblesses de cette approche.

 

Premier sous-entendu : les RPS existent dans toutes les entreprises, pour preuve, on les diagnostique. Diagnostiquer, c'est nommer, et nommer c'est attribuer une existence.

Ici, l’aspect « fourre-tout » de la définition des RPS[1] peut-être bien utile, qui permet de « ratisser large » en cas de besoin. La frontière entre ce qui relève des RPS et ce qui n’en relève pas étant très « élastique », il est aisé de trouver des RPS là où il n'y en a pas, et inversement, de n'en pas trouver là où il y en a.

 

Deuxième sous-entendu : les RPS sont "simples", du moins "pas si compliqués", puisqu'ils peuvent être appréhendés par un "bon" diagnostic.

Dans le "monde" des risques psychosociaux, la complexité n’est pas très "vendeuse", aussi les problématiques sont-elles souvent simplifiées, et ainsi parfois dénaturées.

 

Troisième sous-entendu : les solutions aussi, sont simples : dans la dialectique entreprises/cabinets RPS, chaque problème trouve sa solution. A-t-on jamais vu un patient sortir de chez le médecin sans la moindre prescription, ni le moindre conseil ? Et ces solutions sont bien sûr à la portée des entreprises, qui peuvent agir efficacement, sans remise en cause radicale, ou du moins profonde, de leur organisation du travail.

Cette manière de voir les choses offre l'avantage de conférer à l’action une efficacité comparable à celle de la pensée magique. Ainsi, dans le cadre des démarches RPS, trouve-t-on bien souvent les problèmes que l’on souhaite trouver (autant que possible "superficiels", c'est-à-dire n’impliquant aucune remise en question profonde de l’organisation du travail), et met-on en œuvre pour se débarrasser de ceux-ci, les solutions qu’il n’est ni trop compliqué, ni même trop onéreux ou impliquant, de mettre en œuvre.

 

Des solutions "raisonnables", appliquées à la gestion de problématiques elles aussi "raisonnables".

Depuis bientôt dix ans qu'avec l'approche RPS, on "joue au docteur" avec les mots de la souffrance autant qu'avec les maux des travailleurs qui l’endurent, il est temps de constater la difficulté de celle-ci à aider les acteurs de la santé au travail à améliorer leurs pratiques.

Certains cabinets RPS, armés d'honnêteté intellectuelle et de pragmatisme, perçoivent depuis longtemps déjà la nécessité de remettre en question cette approche,  et la logique gestionnaire simplificatrice qu’elle a engendrée.

Lu 7133 fois Dernière modification le lundi, 01 juin 2015 13:28
La rédaction

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