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Et si nous parlions de la communication bloquante ?

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Les mouvements sociaux du 1er semestre 2018 nous rappellent l’importance de la communication. Et plus particulièrement de la communication directe, d’individu à individu, sans le recours aux outils numériques inévitablement déformant.

Le film « En guerre » de Stéphane Brizé relate une situation de crise extrême dans le milieu ouvrier. Indubitablement, il donne matière à réflexion sur les relations humaines. Ce cas concret, particulièrement réaliste, nous permet donc de nous rappeler quelques fondamentaux et de dégager des pistes à explorer pour emprunter le bon chemin.

« En guerre » : un film pédagogique

« En guerre » narre les différents stades d’un conflit entre, d’une part, des ouvriers et leurs employeurs directs ainsi que les différents échelons du consortium et, d’autre part, entre les ouvriers eux-mêmes.

Servi par la justesse de ton de l’ensemble des protagonistes, un scénario bien agencé et un cadrage serré qui place le spectateur au cœur de l’action, le film met en lumière une impossible communication qui aboutit à une situation inextricable. Cette dernière est cadencée par une série de réunions arrachées à chacun des niveaux supérieurs successifs.
Considérés séparément, les différents points de vue exprimés sont cohérents. Mais à chaque début de prise de parole des dirigeants et de leurs assistants, il est évident que le courant ne passera pas : les introductions supposées démontrer l’empathie sonnent systématiquement faux ; les leçons d’économie, malgré leur validité, sont à mille lieux des problèmes concrets d’ouvriers qui se savent au bord du gouffre.

Dans cet article, nous nous intéresserons plus particulièrement aux relations entre les ouvriers et les cadres.

Sur la communication : trois enseignements majeurs

Au-delà de tout savoir théorique, il y a des incontournables en matière de communication, dans la forme comme dans le fond. S’en affranchir garantit de mal démarrer. Au pire, d’aller dans le mur.

1. Attention aux promesses
Une promesse non tenue entraîne la perte de confiance.
Dans le film, c’est bel et bien cela qui déclenche le conflit. Les circonstances, les aléas du marché et les contraintes imposées par les différents échelons supérieurs sont telles que le directeur de l’usine ne parvient plus à maintenir ses engagements. La promesse d’alors n’était-elle donc qu’un artifice pour sortir de la crise précédente ? Dans tous les cas, le mal est fait.
Tout le monde connaît l’expression « les promesses n’engagent que ceux qui les croient ». Ce n’est pas inexact mais, si on en reste là, à quoi bon promettre, donner sa parole, s’engager ? Mieux vaudrait se référer au mot de Napoléon : « Un homme ne doit jamais promettre que ce qu’il veut tenir ».

2. Savoir se situer
Un cadre, même subalterne, sera toujours considéré comme un cadre, surtout dans la tempête
Lors d’une séquence, un cadre intermédiaire se joint aux ouvriers grévistes. Il leur explique l’attitude de la direction et la stratégie de cette dernière au regard de l’action des grévistes. Il formule également quelques suggestions. Mal lui en prend. En effet, bien que ses arguments et ses conseils soient pertinents, il cumule deux défauts majeurs :
• il fait définitivement partie des « eux » (dernière évocation du téléfilm « L’école du pouvoir », également à étudier mais pour d’autres raisons) ;
• il ne pourra jamais faire admettre aux employés qu’il est dans le même navire. Sa situation n’est pas comparable, même dans l’hypothèse d’une faible différence de revenus.
La compassion, ou ce qui est pris pour telle, ne passe pas ici.

3. Le poids des mots
Les formules convenues peuvent générer le rejet
Le principal enseignement du film réside dans l’erreur majeure - et systématique - des différents échelons hiérarchiques : l’utilisation malheureuse de formules toutes faites. En effet, depuis plusieurs décennies, quelles que soient, d’ailleurs, les circonstances, les introductions sont toutes du même ordre. Elles poursuivent un objectif : démontrer (au mieux), afficher (le plus souvent) une certaine forme de sympathie, voire de proximité.
Le spectateur ne peut donc que s’identifier aux ouvriers qui, réunion après réunion, entendent les mêmes introductions, au bilan très creuses. Il comprend en même temps qu’eux que le « mais » vient derrière et que l’entrevue ne débouchera sur rien. Ce ressenti est aggravé lorsque, au cours d’une même séance, l’ensemble des intervenants des instances dirigeantes y vont de leur couplet, récitant ad nauseam des formules toutes faites.

Quelques pistes de réflexion
• En tout état de cause, ce film devrait être visionné et étudié dans les écoles de management, de commerce, d’administration… et de communication. Il devrait également être étudié dans les entreprises, entre cadres et, pourquoi pas, avec l’ensemble des employés.
• Parallèlement, comme pour tout cas concret, il serait utile de se livrer à un peu d’introspection : « et moi, qu’aurais-je fait ? ».
• Enfin, à problème concret, solutions concrètes. Passée la première réunion, autant rentrer immédiatement dans le vif du sujet. Sauf à vouloir privilégier l’évitement. Mais ça...

Dans le monde dans lequel nous vivons, tout n’est que communication. Pour le meilleur ou pour le pire.

Par Olivier DOUIN, Président de « Olivier Douin Conseil » (ODC)


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