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Comment renforcer la surveillance du risque client pour assurer la pérennité de son activité

Comment renforcer la surveillance du risque client pour assurer la pérennité de son activité

Finance Écrit par  jeudi, 12 novembre 2020 11:26 Taille de police Réduire la taille de la police Augmenter la taille de police
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Si dans un premier temps les dispositifs d’aides de l’État ont permis de juguler les défaillances d’entreprises et l’augmentation des délais de paiement, les entreprises ne cachent pas leurs inquiétudes pour cette fin d’année.  Une tendance qui s’est d’ailleurs renforcée avec ce second confinement et la fermeture des commerces dits "non essentiels".

L’Insee note ainsi que « dans les services, les chefs d’entreprise restent assez pessimistes sur leurs propres perspectives pour les trois prochains mois et les industriels sont moins optimistes qu’en août sur la production à venir ». Dans ce contexte incertain et tendu, nombre d’entreprises constatent d’ailleurs une dégradation des délais de paiement, notamment depuis cet été.

« Depuis la fin du mois de juillet, nous constatons un étirement des délais de paiement de 20 à 25 % par rapport à la même période en 2019, mais également par rapport au mois de juin, déclare le Credit Manager d’une entreprise spécialisée dans le négoce de sanitaire et chauffage, également administrateur à l’Association Française des Crédit Managers (AFDCC). Les chiffres du mois d’août ne devraient pas être meilleurs. Une tendance qui illustre les difficultés que commencent à rencontrer certains de nos clients et en particulier ceux qui travaillent dans le BtoB ».

Les craintes des fournisseurs se portent surtout sur les entreprises déjà fortement endettées avant le début de la crise, et qui ont par ailleurs bénéficié du Prêt Garanti par l’État (PGE), des reports de charges et du chômage partiel. Aujourd’hui, alors que tous ces dispositifs d’aides commencent à toucher à leur fin (sauf pour certains secteurs d’activité) et que l’activité des tribunaux de commerce reprend progressivement, les entreprises s’attendent à une forte hausse du volume des liquidations et redressements judiciaires. Tout l’enjeu pour elles consiste donc à les anticiper et à identifier au mieux ceux qui, parmi leurs clients, pourraient se retrouver en difficulté financière. Il convient à cet effet de renforcer la surveillance du risque client pour assurer a minima la pérennité de son organisation.

S’en remettre aux assureurs-crédit

Pour celles qui sont assurées clients, le premier niveau d’alerte repose sur l’évolution du niveau d’encours garanti. « Depuis le début de la crise sanitaire, nos niveaux d’encours garantis octroyés par notre assureur-crédit Euler Hermes ont diminué, voire ont été supprimés pour plus de 30 % de nos clients, précise Katrin Reimann, gestionnaire de risques et Credit Manager de Gascogne S.A. Nous limitons alors les commandes aux seuls encours garantis par notre assureur-crédit et ce, tant que le client n’a pas réglé ses échéances précédentes ».

Dès lors que l’assureur-crédit ne couvre plus les encours, le mot d’ordre, dans la plupart des entreprises, consiste à veiller scrupuleusement à ce que leurs clients respectent les délais de paiement, et à ne pas accepter de nouvelles commandes tant que les factures précédentes n’ont pas étés réglées.

Multiplier et croiser les sources d’informations financières

Parallèlement, et afin de ne pas se limiter aux décisions de couvertures des assureurs-crédit, les entreprises tendent également à multiplier, depuis quelque mois, leurs actions de suivi et d’analyses du risque client. « Depuis mars dernier, nous réalisons une balance âgée toutes les semaines (comptes clients qui ne sont pas soldés déclinés par tranches d’âge), contre tous les mois en période post-crise, ajoute Katrin Reimann. Nous détectons ainsi beaucoup plus rapidement les éventuelles dégradations de comportements de paiement de nos clients et pouvons agir en conséquence auprès de nos clients retardataires ». Les recours aux prestataires d’information d’entreprises se démocratisent également.

« Nous n’hésitons pas à multiplier nos sources d’informations financières et à croiser ces différentes données pour affiner notre connaissance du risque client, précise Katrin Reimann. Nous allons ainsi chercher des informations sur la base de Bureau Van Dick (BVD) ou auprès de la société Urios. Une démarche que nous entendons aujourd’hui renforcer au regard du contexte en sourçant des données auprès d’autres prestataires comme Infolegale ou le Comptoir Fiduciaire de Paris ». D’autres entreprises recourent à ces prestataires pour réaliser des analyses, des Benchmarks et des comparaisons, notamment sur l’évolution des comportements de paiement et de la santé financière de leurs clients.

Favoriser la proximité client

Le recours aux commerciaux pour récupérer des informations à la source, directement auprès des clients, devient également la norme pour de nombreuses entreprises.

« Nous privilégions également plus que jamais le dialogue direct avec nos clients, précise Isabelle Costes, responsable Credit Management d’Hydro Building System France (HBSF). Nous échangeons sur les mesures qu’ils ont mises en place ainsi que sur les dispositifs qu’ils ont sollicités (PGE, chômage partiel, reports de charges, etc.), sur l’état de leur carnet de commandes et des chantiers en cours, sur les soutiens ou pas de leurs banques… Le profil du dirigeant reste un facteur déterminant chez nos clients, quant à la capacité de résilience de la société. Autant de démarches dans lesquelles nos commerciaux sont fortement moteurs et impliqués ».

Sur la base des informations ainsi recueillies et de l’évolution du risque client, les entreprises mettent en oeuvre différents dispositifs : diminution des délais de paiement octroyés, paiement comptant, garanties bancaires, paiement direct par le client final pour les sous-traitants dans le secteur du BTP notamment.

Concilier prévention des risques et poursuite d’activité 

Au-delà de la prévention et de la maîtrise du risque, l’enjeu pour les entreprises aujourd’hui consiste également à sécuriser leur chiffre d’affaires.

« Elles ne peuvent en effet se permettre de se priver d’un client sous prétexte qu’il est « de moyen à très fort risque », indique Laura Delmas, fondatrice et dirigeante d’ACM Experts. Pour concilier la prévention des risques avec la poursuite de leur activité, nous leur recommandons, entre autres, de discuter directement avec les dirigeants de leurs entreprises clientes et de renégocier avec eux les conditions de règlements, les délais de paiement consentis et les niveaux d’encours octroyés ».

Lu 1434 fois Dernière modification le lundi, 16 novembre 2020 08:41
Anne Del Pozo

Elle collabore depuis près de 20 ans à différents magazines en qualité de journaliste.

Elle y traite de sujets articulés essentiellement autour de la finance, des flottes automobiles, du voyage et du tourisme d'affaires ou encore des ressources humaines. Anne del Pozo participe également à la rédaction de nombreux témoignages clients et de newsletters d'entreprise.