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La gestion des documents, obligations légales et certification

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La notion de « gestion des documents » recouvre deux concepts qu’il faut bien différencier. Le premier est celui communément appelé « GED », qui désigne l’outil informatique assurant le stockage et l’accès à des documents sous format numérique de façon rationnelle, en permettant l’accès à l’exemplaire de référence par plusieurs utilisateurs au moyen de différents paramètres choisis en fonction de la typologie de documents. Le second est celui de « SAE », pour « Système d’Archivage Electronique », qui est un véritable outil de gestion du patrimoine informationnel de l’entreprise.


Le SAE a des points communs avec la GED en ce qu’il permet de conserver des documents sous forme numérique. Mais il en diffère sur quelques caractéristiques fondamentales.

La plus structurante est sans doute celle de la valeur probante des documents, qui n’est pas l’objectif de la GED, puisque celle-ci contient indifféremment des documents papiers scannés ou des documents numériques natifs sans préoccupation de la valeur probante de ceux-ci. Le SAE, au contraire, a comme principal objectif de conférer valeur probante aux documents électroniques qui y sont conservés, ce qui suppose la mise en œuvre de moyens techniques à l’état de l’art et la gestion de leur obsolescence/ remplacement au cours du temps.

La seconde caractéristique différenciante d’un SAE est celle de la gestion de la durée de conservation d’un document : celui-ci ne doit pas être détruit pendant sa durée de conser­vation et il doit être détruit lorsque celle-ci est expirée. Cette fonction­nalité est essentielle pour éviter à l’entreprise de se voir accuser d’avoir frauduleusement détruit des documents compromettants alors que leur durée de conservation n’était pas expirée.

Un système de GED n’est soumis à aucune obligation légale particulière. C’est une simple commodité que l’entreprise gère selon ses propres besoins. Un SAE est au contraire triplement encadré au plan légal et réglementaire :
• Par les obligations générales qui portent sur certaines typologies de documents, tous secteurs confondus (les factures, les documents comptables par exemple).
• Par les obligations sectorielles qui pèsent sur certaines activités réglementées : secteur bancaire, pharmaceutique, marchés publics, etc…
• Par l’encadrement légal et réglementaire du droit de la preuve, dont le respect est nécessaire pour assurer la valeur probante des documents électroniques conservés.

C’est essentiellement sur ce dernier point que se pose la question de la certification, c'est-à-dire l’opération qui consiste à faire valider par un tiers la conformité d’un produit ou service à certaines spécifications. En d’autres termes, une entreprise peut-elle faire certifier son SAE pour donner, de façon certaine, valeur probante aux documents qu’il contient ?


Cette question appelle une double réponse. La première est que la certification n’est pas une valeur en soi. On ne peut certifier un service, ou un produit, que par rapport à un réfé­rentiel normatif, ce qui suppose que celui-ci existe. En matière de SAE, nous en sommes au tout début de l’émergence des référentiels de certification et l’on peut, pour l’essentiel, compter sur la prochaine disponibilité des référentiels correspondant à la norme ISO/AFNOR NF 42 013 et à la norme ISO 27 001.
La seconde est que la certification n’emporte une valeur juridique que si celle-ci est prévue par un texte légal ou réglementaire. Par exemple, la signature électronique sécurisée est présumée fiable si elle est mise en œuvre au travers de systèmes et de prestataires certifiés parce que l’article 1316-4 du Code Civil le prévoit. Il n’existe rien de tel pour un SAE.

Le fait, pour une entreprise, de faire certifier son SAE par rapport à un référentiel normatif de son choix n’emportera donc pas, de façon automatique, le fait que les documents qu’il conserve aient valeur probante. Mais ce sera, en revanche, un indicateur de confiance très fort en cas de litige, de nature à éviter le recours à des expertises longues et coûteuses en cas de remise en cause de la valeur probante d’un document conservé par un SAE certifié.
En conclusion, si un SAE comprend des documents numériques auxquels est attaché un enjeu important, en termes de valeur probante, il est recommandé de le faire certifier par rapport à un des référentiels existants, en matière d’archivage numérique.

 

Par Isabelle RENARD - Docteur Ingénieur, Avocat associée, Racine, cabinet d’avocats

Lu 7098 fois Dernière modification le mercredi, 26 août 2015 13:37
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