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Retournement ou cession : quand opérer un carve-out ?

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Lors de la 3ème conférence de l’Observatoire du Carve-Out, qui s’est tenue le 13 octobre 2021, les intervenants venus faire part de leur retour d’expérience ont mis en avant l’intérêt du carve-out comme outil de la stratégie de développement. Ils ont également échangé sur les enjeux, les points de vigilance et les facteurs clés à prendre en considération lors de la mise en œuvre d’une opération de carve-out, en particulier lorsque l’activité concernée est sous performante.

Dans quelle logique s’inscrit une opération de carve-out ?

Cette thématique « Retournement ou cession : quand opérer un carve-out ? » peut être appréhendée sous deux angles. 

  • Dans une logique purement stratégique, lorsqu’elle s’inscrit dans une réflexion de (re)développement de l’activité concernée : plan de redressement en interne ? ou solution d’adossement voire cession à un partenaire/repreneur stratégique ? Dans ce cas, le carve-out constitue un outil au service d’une stratégie offensive ou défensive. 
  • La seconde approche pour traiter le sujet est de partir du principe que la décision est prise pour réaliser le désengagement d’une activité non stratégique sous performante, voire non profitable. Dans ce cas, l’enjeu porte plus sur le process de mise en œuvre, notamment à quel moment opérer le retournement de l’activité : sous l’actionnariat présent ou par le repreneur post-acquisition ? 

Stratégie de développement offensive ou recentrage sur des activités cœur de métier : deux approches pour deux enjeux différents

Dans le cadre d’une stratégie de développement offensive, le carve-out peut s’avérer un moyen adapté pour accélérer la croissance d’une activité de diversification afin de prendre rapidement des parts de marché et s’établir comme un acteur de référence. C’est particulièrement le cas pour des secteurs fortement capitalistiques qui requièrent des financements significatifs.

Comme l’indiquait Emilio Zito, Directeur Fusions & Acquisitions et Directeur Relations Investisseurs au Groupe EDF, le carve-out est un outil utilisé pour aller chercher du financement afin de soutenir le développement de leurs activités dans le domaine des énergies renouvelables qui s’avèrent être particulièrement capitalistiques. Le recours au carve-out est aussi la voie choisie par Sanofi comme l’explique Pierre Vergriete, API Carve-out Project Leader, en charge du projet de carve-out d’EUROAPI. Cette nouvelle entité autonome dédiée au développement, à la production et à la commercialisation à des tiers de principes actifs pharmaceutiques (API), devrait être introduite sur Euronext Paris en 2022.

Le carve-out est aussi un outil très régulièrement utilisé dans le cadre d’une stratégie de recentrage sur des activités cœur de métier. Le détourage et le désengagement d’activités non stratégiques est toujours une opération délicate, avec souvent de nombreux enjeux à gérer, notamment lorsque ce carve-out est opéré par un grand groupe à partir d’une organisation imbriquée et complexe. Ce type de projet est d’autant plus sensible à gérer lorsque l’activité concernée est sous performante ou non profitable.

Les piliers essentiels pour réussir son opération de carve-out

Benoit ParnetDans le cas d’un projet de détourage et de cession d’une activité qui nécessite d’être redressée, l’approche sur mesure et l’anticipation sont des principes de base afin de se donner les meilleurs moyens de réussir sa mise en œuvre. 

  • Les solutions pour retourner et redévelopper une activité sont spécifiques et doivent permettre de définir le profil idéal du repreneur capable d’apporter les meilleurs effets de levier recherchés (par exemple sur le plan de la frappe commerciale, l’internationalisation des ventes, la complémentarité produit, l’apport technologique, la taille critique pour les achats matières, …). 
  • L’anticipation est critique lorsque le cédant est convaincu qu’il ne sera pas lui-même en mesure de redresser l’activité non stratégique. Cela peut être le cas lorsque pour redresser l’activité, il faudrait à la fois adapter la structure de coût au niveau des volumes de ventes et investir de manière significative alors qu’elle n’est plus cœur de métier. Elle permet de tester le marché et d’identifier des acteurs qui peuvent apporter les briques stratégiques qui manquent à cette activité et renforcer certains de ses maillons faibles. Elle donne parfois la possibilité d’identifier des repreneurs en forte croissance, avec des capacités de production saturées qui ont la possibilité d’apporter de l’activité à court terme (par exemple avec des logiques d’intégration verticale), permettant ainsi de contribuer à redynamiser l’activité à très court terme. 

L’identification d’un repreneur stratégique pouvant apporter une forte contribution « business » à une activité confrontée à un sureffectif, peut amener une solution permettant de réduire le besoin de restructuration, voire de le neutraliser. On voit bien là l’importance que peut avoir l’identification d’une solution de reprise en amont d’un carve-out. Cela permet d’orienter la stratégie de sa mise en œuvre.

Récemment, il a été possible de trouver une solution de maintien d’emploi pour une activité d’extrusion de tubes inox appartenant à un grand groupe international. Ce dernier envisageait d’arrêter cette activité dont les deux tiers du chiffre d’affaires avaient été très fortement impactés par la crise du marché de l’aéronautique. Le reste du chiffre d’affaires était essentiellement réalisé dans le secteur nucléaire avec un vrai savoir-faire technologique, des produits critiques et des agréments lui permettant de travailler avec les donneurs d’ordre de la filière nucléaire française. En lançant en amont une recherche pour promouvoir l’activité nucléaire auprès de repreneurs potentiels, il a été possible d’identifier une ETI française très intéressée par la reprise de cette activité afin de se diversifier sur le marché du nucléaire et d’intégrer la fabrication de ces tubes dans sa chaîne de valeur industrielle. Cette reprise a permis d’amener à très court terme un chiffre d’affaires complémentaire significatif à l’activité concernée et d’éviter la restructuration initialement envisagée.

Dans certains cas, l’enjeu business pour le groupe cédant s’avère être à la fois au niveau de l’activité qu’il souhaite vendre mais aussi concerner l’activité résiduelle sur laquelle il veut recentrer sa stratégie de développement. Si l’activité qui a vocation à rester en interne a également besoin d’être redimensionnée afin d’améliorer ses performances et qu’elle va perdre en taille critique après le désengagement de l’activité non stratégique, il peut être souhaitable d’envisager une transformation de l’ensemble avant d’opérer le carve-out.

Il peut également se rajouter des éléments de réflexion qui sont liés à la première étape de détourage avant celle de la cession. Dans certains cas, ce détourage peut être complexe car l’activité cédée provient d’une organisation imbriquée et complexe, comme par exemple dans le cas des organisations matricielles de grands groupes. Les conseils juridiques du cédant peuvent lui recommander d’effectuer préalablement en interne l’opération d’autonomisation de l’activité concernée par le carve-out. Avec l’objectif de pouvoir réaliser un transfert automatique des contrats de travail au repreneur, l’approche retenue pourra être de sécuriser le transfert d’une entité économique autonome au sein d’un nouvel véhicule juridique « Newco » avant de procéder à la cession de ses titres (« share deal »).

On voit bien que ces transformations organisationnelles couplées avec des besoins de réduction de la structure de coûts peuvent dans certains cas légitimer le fait de prendre le temps pour réaliser ces réorganisations en interne avant de s’attaquer à l’opération de cession.

D’autres considérations peuvent guider la temporalité d’une opération de retournement, comme la culture et la nature des relations sociales. Quitter un grand groupe sans savoir par qui on va être repris peut se révéler anxiogène. Quitter un grand groupe pour rejoindre une PME en croissance grâce à une stratégie de niche pertinente, peut aussi inquiéter un salarié de grand groupe. Les partenaires sociaux pourront dans ce cas demander que les salariés impactés par un projet de redressement puissent bénéficier d’un schéma leur sécurisant des mesures d’accompagnement à la hauteur du statut et des moyens du groupe qu’ils vont quitter.

Michel Erard, ancien DRH Europe du groupe Mondelez met en avant que « la clarté stratégique contribue largement à l’engagement des équipes et leur adhésion aux projets. Les acteurs d’une façon générale, et notamment les salariés ne sont pas réticents aux changements pour autant qu’une vision soit partagée. En revanche, ils souffrent souvent pendant les périodes de transition, surtout si celles-ci n’ont pas été préparées via une ingénierie et une communication sociale anticipées, préparées, partagées et donc de qualité ».

En résumé, la décision d’effectuer le retournement par le cédant ou le repreneur doit prendre en considération, au cas par cas, de multiples facteurs : calendrier envisagé, degré de sous performance de l’activité concernée par le carve-out (et principaux enjeux pour la redresser), qualité du repreneur et de son projet, mais aussi situation du groupe, complexité de son organisation, sa culture, ses relations sociales et son risque réputationnel.

Par Benoît Parnet, Associé & Vice-Président d’Oneida Associés (groupe Oasys & Cie). Il dirige le practice M&A « Solutions de reprise ». Oneida Associés est un des membres contributeurs de l’Observatoire du Carve-Out.

Lu 9200 fois Dernière modification le mercredi, 27 octobre 2021 12:50
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