Imprimer cette page
Fabrice Le Saché veut donner de l’oxygène à l’entreprise

Fabrice Le Saché veut donner de l’oxygène à l’entreprise

Évaluer cet élément
(2 Votes)

Atypique, Fabrice Le Saché l’est assurément à plus d’un titre. À 35 ans, ce chef d’entreprise dynamique défriche avec succès les marchés émergents de la finance carbone en Afrique. Il s’est aussi fait remarquer en étant le plus jeune des candidats à la succession de Pierre Gattaz à la tête du Medef. S’il n’a pas été élu, il prend rendez-vous pour l’avenir en entrant au comité exécutif du Medef.

GPO Magazine : Comment en êtes-vous arrivé à vous intéresser à la finance carbone ?
Fabrice Le Saché : Je pense que c’était déjà inscrit quelque part dans mon parcours de formation. J'ai fait du droit international à Paris II, des relations internationales à la Sorbonne pour terminer par une année à l'étranger, en Californie, pour passer l'équivalent d'un master de droit international comparé. À cette occasion j’ai rédigé un mémoire sur la compatibilité des règles entre l'OMC (Organisation Mondiale du Commerce) et le protocole de Kyoto. Ce dernier, signé en 1997 pour entrer en vigueur en 2005, a mis en place des mécanismes pour contraindre les pays à réduire les émissions de CO2 afin de réduire le réchauffement climatique. En même temps, pour éviter que le coût environnemental ne se traduise par un coût social avec la fermeture d’usines, les états et les industriels ont eu la possibilité d’acheter des crédits carbone pour respecter leurs plafonds d’émission, auprès de ceux qui font des efforts les plus importants pour réduire les émissions. En Afrique, le mécanisme de développement propre (MDP) donne droit à un crédit carbone dès lors qu’un projet permet de réduire les émissions, afin de générer des revenus complémentaires pour les projets d’énergies renouvelables ou d’efficacité énergétique.

GPO Magazine : Pourquoi avez-vous choisi d’intervenir sur le continent africain ?
Fabrice Le Saché : Lorsque le marché de la finance carbone a commencé à s’organiser, les acteurs se sont surtout intéressés à l’Asie et à l’Amérique Latine. Or, il y avait aussi beaucoup à faire sur le continent africain où certains pays affichent aujourd’hui des taux de croissance parmi les plus forts au monde. Cependant l'Afrique n'est pas un bloc monolithique : il y a 54 pays, donc 54 réalités, voire même plusieurs réalités dans un même pays. Mais il y a une dynamique forte, une population jeune et pleine d’énergie, des entreprises africaines puissantes et des unions douanières. Nous devons aussi absolument aider ce continent à se développer pour résoudre les problématiques migratoires aux portes de l'Europe.

GPO Magazine : De quelle manière intervient Aera Group ?
Fabrice Le Saché : Nous intervenons de deux manières. D’une part, en tant que conseil pour que les projets par exemple de centrale solaire ou de production biomasse puissent être inscrits à l’ONU, une étape indispensable avant de pouvoir monétiser des crédits carbone. D’autre part, en tant que commercialisateur puisque nous trouvons des clients qui vont acheter ces crédits carbone. Aera Group, qui a succédé il y a trois ans à Ecosur Afrique que j’avais fondé en 2009, est une jeune entreprise. Cependant, notre portefeuille est aujourd’hui le plus important du continent africain avec plus de quarante projets gérés dans dix-sept pays dans lesquels nous avons aussi souvent appuyé le lancement du premier projet crédit carbone. Grâce à l’expertise que nous possédons aujourd’hui, l’activité d’Aera Group se développe rapidement, nous venons même de réaliser un premier semestre record avec une croissance de plus de 50 %.

GPO Magazine : Quelle place tient la transformation numérique dans vos perspectives d’évolution ?
Fabrice Le Saché : Le numérique est déjà partout, dans nos procédés, dans notre façon de travailler. Par exemple, nos contrats sont automatisés avec des options pour avoir davantage de sécurité juridique. Nos propositions commerciales sont également automatisées, ce qui nous a permis de réduire le temps d’élaboration d’une proposition d’une demi-journée à moins de trente minutes. Nous travaillons sur une plate-forme où nos clients peuvent suivre en temps réel l’évolution de leur dossier. Nous sommes déjà une entreprise dans laquelle le travail est décentralisé et dématérialisé. Notre siège est à Paris, mais nous utilisons des espaces de bureaux partagés et avons des collaborateurs qui travaillent là où ils vivent, Annecy et Rennes, par exemple, et qui vont directement en Afrique remplir leur mission. Tout ne peut être basé sur le digital et il y a aussi des réunions physiques, mais je crois que c’est aussi une tendance forte dans l’organisation des entreprises de permettre aux collaborateurs de s’épanouir tant personnellement que professionnellement dans un climat de confiance.

GPO Magazine : Vous vous êtes aussi engagé dans le Medef jusqu’à être candidat à la présidence nationale. Quel était le sens de cet engagement ?
Fabrice Le Saché : La première motivation, en adhérant au Medef International, était professionnelle parce que je travaille avec l’Afrique et que l’organisation patronale organise régulièrement des déplacements dans ces pays. En me rendant compte qu’il n’y avait pas beaucoup de jeunes pousses, de start-up et de petites entreprises dans ces délégations, j’ai proposé au Medef International d’organiser des évènements spécifiques. Cela a bien marché, et généré des affaires pour les entreprises qui ont saisi l’opportunité. Dans la foulée je suis devenu administrateur du Medef International et j’ai eu envie d’aller plus loin, puisque des élections étaient prévues pour la succession de Pierre Gattaz. J’ai obtenu les parrainages nécessaires pour valider ma candidature, j’ai lancé mon programme, le Medef en mouvement, et ma campagne au cours de laquelle j'ai fait un tour de France de 70 départements, avec plus de 600 rencontres et parcouru des milliers de kilomètres. J’étais le candidat le plus jeune, et même si je n’ai pas été élu, cela a été une expérience formidable d’autant que je poursuis mon engagement au sein du Medef où je viens d’entrer au conseil exécutif.

Lu 15494 fois Dernière modification le mardi, 10 juillet 2018 07:56
Laurent Locurcio

Journaliste économique, il a notamment collaboré avec la presse spécialisée dont La Tribune, Le Point, Le Monde, LSA, Sport Eco, et bien entendu GPO Magazine. Il a également participé au lancement de titres de presse et a été rédacteur en chef  d’un important magazine d’entreprise. Auteur également de livres d’entreprises, il intervient aussi auprès d’étudiants en formation multi-médias.