Imprimer cette page
Didier Pascual, Groupe Afflelou - La détermination et le travail

Didier Pascual, Groupe Afflelou - La détermination et le travail

Évaluer cet élément
(5 Votes)

Après des études d’expertise comptable, Didier Pascual commence sa carrière au sein du Groupe Morereau, société d’Expertise Comptable et de Commissariat aux Comptes. Il rejoint ensuite le Groupe GiFi, d’abord en qualité de directeur administratif et financier, puis de directeur général adjoint. En 2003, il rejoint le Groupe Afflelou en tant que directeur général adjoint et en février 2018, il en est nommé PDG. Un parcours exemplaire pour cet homme, travailleur acharné, qui a su rester simple, modeste et authentique.

Fidèle à la stratégie du Groupe Afflelou, il poursuit, en sa qualité de PDG, le business model de l’innovation et celui de la franchise, tout en gardant le cap de la communication si bien mise en scène par Alain Afflelou lui-même. Avec une priorité, la transformation digitale afin que le Groupe Afflelou ne manque pas ce virage important. Une mission accomplie puisque Didier Pascual a su conserver l’ADN propre au Groupe Afflelou tout en conduisant cette entreprise vers le futur.

GPO Magazine : Quel est votre parcours ?
Didier Pascual : J’ai obtenu mon diplôme d’expertise comptable en 1994. La particularité de mon parcours est d’être assez simple puisque je n’ai eu dans toute ma carrière professionnelle que trois employeurs. J’ai commencé par travailler en 1985 comme expert-comptable dans un cabinet d’audit d’expertise comptable situé dans le sud-ouest, le Groupe Morereau. Puis de 1991 à 2003, j’ai exercé plusieurs fonctions dans le Groupe GiFi (Équipement pour la maison et la famille à prix bas). J’ai d’abord été directeur administratif et financier de 1991 à 1999 et directeur général adjoint de 1999 à 2001, puis directeur général délégué. Depuis 2003, j’ai rejoint le Groupe AFFLELOU où j’ai d’abord exercé en qualité de directeur général adjoint et, depuis février 2018, j’ai été nommé PDG du Groupe AFFLELOU. Je suis donc dans le Groupe depuis 15 ans.

GPO Magazine : Vous êtes donc un fidèle d’ALAIN AFFLELOU ?
Didier Pascual : Après 15 ans au sein du groupe, je crois que l’on peut effectivement me considérer ainsi. Certains aiment changer d’entreprise tous les 3 ans ; en ce qui me concerne, je n’aime pas voguer d’entreprise en entreprise.

GPO Magazine : Dans quelles conditions a été créée la chaîne de magasins d’optique, Alain Afflelou ?
Didier Pascual : Alain Afflelou est opticien et audioprothésiste diplômé, ce qui assoit une crédibilité jamais démentie. Juste après ce diplôme, il n’a eu qu’une envie, celle de créer un premier point de vente. Une première boutique voit le jour en 1972 à Bordeaux. Un virage important a lieu en 1978 avec la création de la franchise. À cette date, il était précurseur. Ensuite, son succès a été jalonné d’innovations dans les années 90 telles que le verre 2 AI, un verre incassable, « Tchin-Tchin » (pour 1 euro de plus, le porteur bénéficie d’une seconde paire de lunettes de qualité), « Forty » (Coffret de 4 paires Forty pour les presbytes afin d’en changer selon l’humeur et le style). D’autres innovations vont suivre dans les années 2000, notamment en 2002 avec l’Ephémère : une lentille à usage unique journalière à 1 € la paire par jour. Et la plus récente, en 2018, la lunette révolutionnaire Smart Tonic, portée par notre égérie Sharon Stone. Ces créations inédites montrent bien que l’innovation est au cœur de l’ADN d’Afflelou.

GPO Magazine : Comment expliquez-vous que votre modèle économique innovant, notamment la franchise, a été souvent copié mais jamais égalé ?
Didier Pascual : Pendant 12 ans, lorsque j’ai travaillé dans le Groupe GiFi, j’ai considéré que le modèle succursaliste était le meilleur. Ce modèle correspondait à l’enseigne qui est basée sur une logique de flux poussés, tout comme le modèle de la franchise correspond parfaitement au Groupe AFFLELOU (ALAIN AFFLELOU, ALAIN AFFLELOU Acousticien, Optical Discount) qui lui repose sur une logique de flux tirés. La franchise est un excellent modèle mais elle ne fonctionne que si vous êtes dans cette logique de flux tirés. Si vous êtes dans une logique de flux poussés, il ne faut pas faire de franchise car le franchisé perd une grande partie de son indépendance. Le choix du modèle dépend de l’organisation mise en place. En ce qui concerne les enseignes ALAIN AFFLELOU et ALAIN AFFLELOU Acousticien, le modèle de la franchise convient tout à fait à notre organisation avec un accompagnement du franchiseur (centrale d’achats, solutions de financement, accès aux innovations, campagnes de communication, accès aux produits exclusifs de la marque AFFLELOU …). Le partenariat avec nos franchisés repose sur une confiance réciproque et le savoir-faire. Nous mettons à leur disposition des formations sur-mesure, des solutions de financement pour les aider à mener à bien leur projet, une équipe pluridisciplinaire pour les soutenir tout au long de leur parcours de franchisé. Mais par-dessus tout, nous sommes attachés à la qualité professionnelle de nos franchisés, nous les accompagnons et pouvons leur apporter une aide financière (dispositif ADELANTE) s’ils ont une expertise reconnue en tant qu’opticien. Nous avons une expérience de plus de 40 ans dans la franchise.

GPO MAGAZINE : Quel est le secret de votre réussite entrepreneuriale ?
Didier Pascual : J’ai beaucoup travaillé tout au long de ma vie professionnelle. On ne peut pas réussir si l’on travaille en dilettante. Il faut aussi prendre du plaisir à ce que l’on fait. Cette notion est essentielle car elle permet de consacrer du temps à son travail sans jamais se lasser. Il faut savoir s’entourer de bons manageurs et collaborateurs afin d’être en mesure d’utiliser l’expertise de chacun. En effet, on ne peut pas tout connaître sur un sujet et il faut apprendre à déléguer. Il convient encore de bien s’organiser et d’avoir un sens pratique développé. Par ailleurs, les contacts sont essentiels et j’ai eu la chance de faire de belles rencontres au cours de ma carrière. Je peux citer Robert Morereau, Philippe Ginestet et Alain Afflelou qui m’ont guidé et beaucoup appris.

GPO MAGAZINE : Et quels conseils donneriez-vous à un jeune entrepreneur ?
Didier Pascual : La détermination est l’une des clés de la réussite pour être un bon entrepreneur. Il faut qu’il soit déterminé dans ses projets. Rien ni personne ne doivent l’arrêter. Bien entendu, il faut avoir une grande capacité de travail. Les entrepreneurs à succès travaillent énormément car ce qu’ils font les passionne. On n’obtient rien si l’on ne s’y investit pas complètement. Il faut être discipliné et savoir s’organiser. Encore faut-il avoir un entourage extrêmement professionnel, tant au niveau des collaborateurs que des conseils. Savoir écouter les conseils de chacun et savoir s’entourer est essentiel. En effet, les mauvais conseils peuvent être vraiment préjudiciables. Une dernière chose : il faut prendre du plaisir, et croire en son projet.

GPO MAGAZINE : L’innovation et la communication ont-elles été un vecteur du succès d’Afflelou ?
Didier Pascual : L’innovation et l’observation des besoins des consommateurs est au cœur de l’ADN du Groupe AFFLELOU. Mais si vous ne savez pas communiquer sur des innovations, il ne peut pas y avoir de succès. Il faut conjuguer le savoir-faire et le faire-savoir. La réussite tient à ces deux composantes : une innovation et une communication bien sentie. L’addition des deux permet, en rendant ces innovations accessibles et en les portant à la connaissance du consommateur, d’engendrer une vraie réussite. La force de l’enseigne ALAIN AFFLELOU est d’avoir été et d’être toujours très performante dans ces deux domaines. Car non seulement Alain Afflelou a multiplié les innovations mais la réussite résulte aussi de l’image qu’il a insufflée dans ses publicités. Ainsi en se mettant lui-même en scène il a permis à nombre de porteurs d’aides auditives de dédramatiser le port des aides. Et d’ailleurs, même si nous avons une excellente équipe de communication (Bénédicte Chalumeau-Vignon en France et Eva Ivars en Espagne), Alain Afflelou continue de jouer un rôle central et décisif sur ce périmètre.

GPO MAGAZINE : La transformation digitale du groupe AFFLELOU est-elle une priorité ?
Didier Pascual : Lorsque j’ai été nommé PDG, ma première décision a été de lancer une réflexion stratégique sur la transformation digitale du Groupe. Aujourd’hui, je ne sais pas s’il existe un business qui puisse se dire que le digital ne le concerne pas. Toutes les entreprises sont concernées à des degrés plus ou moins importants par le digital. Il est au centre de toutes les attentions et touche tous les départements, du juridique (signature électronique) au commercial (magasin, vente…) On doit donc l’intégrer de façon quasi permanente. Dans notre métier, nous avons la chance d’avoir un réseau important de près de 1 500 points de vente. De ce fait, il faut continuer à ouvrir une réflexion omnicanale. Actuellement, un client va commencer son achat en ligne de chez lui et le poursuivre en magasin mais l’inverse peut également avoir lieu. Et ce d’autant que toutes nos offres sont présentées de façon attractive en ligne.
L’enjeu est de mieux connaître nos clients pour que nos campagnes soient parfaitement ciblées. Aujourd’hui, nous avons intégré une solution CRM avec un des leaders mondiaux qu’est Salesforce. Cette solution va nous permettre d’évoluer de façon significative dans la relation clients en améliorant leurs connaissances.

GPO MAGAZINE : Le développement international fait-il également partie de votre « feuille de route » ?
Didier Pascual : Certainement mais il convient de le relativiser. En effet, il faut encore travailler notre potentiel là où nous sommes (France, Espagne, Belgique, Suisse, Portugal…). L’axe de notre développement international ne doit pas nous faire oublier nos fondamentaux. Il faut continuer à croitre sur nos marchés historiques tout en nous ouvrant à de nos nouveaux pays mais en ayant une approche sélective. Pour ce faire, il convient de vérifier que notre interlocuteur nous présentera un plan de développement digne de ce nom à 3 ou 5 ans. En effet, nous sommes très sollicités mais nous ne voulons surtout pas nous disperser. D’ailleurs nous ouvrons des magasins dans deux nouveaux pays fin 2018, au Koweït et en Colombie.

GPO MAGAZINE : Les sites de lunettes 100 % en ligne, y croyez-vous ?
Didier Pascual : Aujourd’hui, nous constatons que ce marché de lunettes 100% en ligne ne fonctionne pas et nous n’y croyons pas. En outre, dans nos métiers, une prise de mesure et un ajustement des montures sont nécessaires, s’agissant surtout des montures équipées de verres progressifs. Le schéma omnicanal peut permettre un rééquilibrage entre les achats en ligne et ceux en magasins. Lorsque l’on a près de 1500 points de vente, il serait dommage de se priver de l’expertise des opticiens de notre réseau. D’ailleurs, les pure players viennent aussi à l’omnicanal. En revanche, la contactologie fonctionne parfaitement en ligne à partir du moment où vous avez votre ordonnance et que vos lentilles sont confortables. Le réassort mensuel ou trimestriel va dès lors pouvoir se faire en ligne jusqu’à la prochaine ordonnance de l’ophtalmologue. Il s’agit encore d’un petit marché mais nous le prenons en considération.

GPO MAGAZINE : Depuis 2011, vous êtes sur le marché de l’audition, pourquoi cette diversification ?
Didier Pascual : L’audition est un marché très complémentaire à l’optique avec des synergies assez élevées. Lorsque vous avez besoin d’un équipement auditif, dans plus de 90% des cas, vous êtes porteur d’un équipement optique. Nous avons dressé le constat au sein de l’enseigne ALAIN AFFLELOU selon lequel les magasins qui ont un corner audio surperforment. Nous avons donc réussi à matérialiser cette synergie. Aujourd’hui, nous avons 250 centres audio avec 1/3 de centres exclusifs et les 2/3 qui sont des espaces au sein des magasins d’optique. Dans les années 2011/2012, lorsque nous avons décidé de lancer cette activité, le taux de sous-équipement était colossal. En outre, les Français s’équipent toujours en moyenne vers 70 ans alors qu’il faudrait le faire à partir de 60 ans. Mais tout ceci est peut-être en train de changer. En effet, pour la plupart des consommateurs, s’équiper d’une aide auditive avait une connotation négative en termes de vieillesse, s’agissant pour eux d’une forme de prothèse, et le problème du prix était aussi un frein à l’équipement. Nous avons apporté un premier élément de réponse sur le prix avec l’offre « Tchin Tchin Audio ». Quant à l’autre aspect, Alain Afflelou a lui-même accepté de se mettre en scène avec un tel équipement ce qui a permis de dédramatiser le port de l’équipement audio.
Nous avons d’ailleurs lancé le 7 octobre dernier un nouveau film publicitaire mettant à l’honneur l’offre Tchin Tchin Audio dans « une scène de vie quotidienne » où l’on retrouve Raymond, l’un des personnages préférés des téléspectateurs de « Scène de ménage », entouré de sa femme et de ses petits-enfants.
Il y a encore du travail à faire mais progressivement les ratios s’améliorent. Et la réforme du gouvernement du Président Macron va certainement dans le sens d’une amélioration de la santé auditive des Français.

GPO MAGAZINE : En dehors de votre entreprise, comment vous ressourcez-vous ?
Didier Pascual : J’ai la chance d’être originaire d’un petit village des Pyrénées. Et lorsque je retourne chez moi, en Ariège, dans ce village isolé du monde, je retrouve mes amis et ma famille. Je fais des balades en montagne et des raquettes en hiver sans croiser qui que ce soit. J’apprécie cette belle nature très préservée et je retrouve de cette manière mes racines. Au-delà de cela, une bonne « plancha » avec les copains … Des plaisirs simples et cela suffit à mon bonheur. Par ailleurs, je suis supporter de l’AS Saint-Étienne depuis 43 ans et dès que je le peux, je file dans le « chaudron » et pendant 1 h 30 j’oublie tout mis à part, bien sûr, « les Verts » et l’ambiance.

ALAIN AFFLELOU
> En quelques chiffres
Création en 1978 de la franchise ALAIN AFFLELOU
Siège social : 11 rue d’Argenson 75008 Paris
Secteur d’activité : distribution optique et audio
CA Groupe 2017 (31.07) : 890.4 M€

Effectif :
+ de 300 salariés permanents (siège)
+ de 900 salariés au pôle succursalistes
Nombre de magasins : Groupe (ALAIN AFFLELOU, ALAIN AFFLELOU Acousticien, Optical Discount) : 1 474 points de vente
+ de 500 franchisés 

Lu 14614 fois Dernière modification le jeudi, 17 octobre 2019 08:33
Linda Ducret

Linda Ducret a une double formation : littéraire (hypokhâgne, licence de philosophie) et juridique (maîtrise de droit des affaires, DESS de Contrats Internationaux). En 1987, elle devient avocate et crée son cabinet en 1990. Elle exerce pendant 15 ans dans différents domaines du droit (droit des affaires, droit pénal, droit de la famille…).

Depuis 2005, elle est journaliste avec comme terrains de prédilections : les dossiers stratégie du dirigeant, propriété intellectuelle, nouvelles technologies, Incentive...Mais également les visions et les portraits d’entrepreneurs.

Écrire est l’une de ses passions. En 2009, elle publie un roman policier Taxi sous influence, finaliste du Prix du Premier roman en ligne.

Elle a publié un recueil de nouvelles : Le Ruban Noir ainsi qu’un polar : L’inconnue du Quai Henri IV.