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La crise a accéléré la transformation des flottes d’entreprises

La crise a accéléré la transformation des flottes d’entreprises

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Les entreprises ont été amenées à ajuster leurs flottes de véhicules en fonction des usages, et à accroître en conséquence l’adoption de nouvelles mobilités. Elles ont également dû faire évoluer leur Car Policy vers davantage de véhicules électrifiés, accélérant ainsi la transition énergétique de leurs flottes. Enfin, la crise a accéléré la digitalisation des relations contractuelles entre les entreprises et leurs fournisseurs.

La crise sanitaire a rebattu les cartes de la physionomie des flottes et de leur gestion. Les entreprises ont dû d’abord s’adapter à la montée en puissance du télétravail lié aux périodes de confinement successives et à la généralisation du travail hybride. Stephane Crasnier

« Le télétravail a entraîné une baisse sensible du kilométrage des collaborateurs en moyenne de 150 km par mois dans les grandes entreprises et de 250 km par mois dans les PME », selon Stéphane Crasnier, PDG d’Alphabet, loueur de véhicules multimarques et filiale de BMW Group.

Du coup, si elles ont réduit leurs coûts de consommation de carburant, les entreprises ont été obligées de revoir également leurs contrats de location longue durée de véhicules en raison de la diminution du kilométrage.

« On a renégocié et revu à la baisse le kilométrage de nos contrats de location de véhicules », confirme Géraldine Chaze, directrice de clientèle de Fatec, gestionnaire de flottes d’entreprises.

La forte baisse du kilométrage a précipité la rationalisation des flottes

Surtout, cette baisse du roulage a précipité la rationalisation des flottes. « La forte diminution des kilométrages des collaborateurs a mis en évidence un certain nombre de déplacements inutiles et a permis d’ajuster la flotte en fonction des usages », indique Anne Bertrand, directrice de la gestion des véhicules du groupe de télécommunications Orange.Mourad Fellah

Ainsi, les entreprises en ont profité pour diminuer le nombre de leurs véhicules et optimiser leur utilisation. « La crise nous a conduit à redimensionner notre parc en éliminant une centaine de véhicules sur 500, alors que la télématique embarquée sur nos véhicules a permis d’optimiser leur usage », explique Mourad Fellah, responsable du parc automobile de Carglass, le spécialiste du vitrage automobile.

Émergence ou renforcement de l’autopartage et du crédit Mobilité

Cette rationalisation de la flotte a alors accéléré l’émergence ou le renforcement de nouvelles mobilités, notamment l’autopartage.

« La baisse du nombre de véhicules liée à la chute du kilométrage des collaborateurs est un peu une aubaine pour notre politique d’autopartage qui permet d'optimiser l'utilisation des véhicules en les mutualisant. Notre objectif est de passer de 3 800 véhicules en autopartage aujourd’hui à 6 000 en 2025 », souligne Anne Bertrand.

Chez Carglass, « on est en train de contractualiser l’autopartage et on réfléchit à l’instauration du crédit Mobilité », explique Mourad Fellah. La crise sanitaire a ainsi réveillé les besoins des entreprises pour le crédit Mobilité qui participe à la rationalisation de leurs flottes.Guillaume Maureau

« De plus en plus d’entreprises proposent à leurs salariés le crédit Mobilité, qui consiste soit à attribuer un plus petit véhicule de fonction au salarié et à lui accorder en complément un crédit Mobilité pour ses déplacements personnels, soit à supprimer son véhicule de fonction et lui octroyer en compensation une grosse enveloppe de crédit Mobilité pour sa mobilité professionnelle et personnelle », explique Guillaume Maureau, directeur général adjoint d’ALD Automotive France, loueur de véhicules multimarques.

Accélération de la digitalisation des relations contractuelles

La pandémie a également accéléré la digitalisation des relations contractuelles des entreprises avec leurs fournisseurs. « Nos partenaires, loueurs, assureurs, pneumaticiens, télématiciens, réparateurs… ont rapidement pris conscience de l’importance cruciale de la digitalisation dans nos relations », souligne Anne Bertrand.Margy Demazy

Les procès-verbaux de livraison et de restitution des véhicules, les constats d’accident ou encore le carnet de bord des conducteurs sont devenus numériques. « La digitalisation apporte une plus grande fluidité dans les échanges entre les entreprises et leurs partenaires », souligne Margy Demazy, directrice commerciale d’Arval France, loueur multimarques et filiale de BNP Paribas.

Réorientation des achats vers des véhicules électrifiés plus disponibles

Depuis mi-2021, les entreprises doivent aussi faire face à des délais de livraison des véhicules beaucoup trop longs, voire incertains ou aléatoires, en raison de la pénurie de semi-conducteurs indispensables à l’électronique multimédia des véhicules qui frappe l’industrie automobile.
Anne Bertrand

« La crise sanitaire a créé cette désorganisation industrielle chez les constructeurs automobiles qui n’ont plus le contrôle de leur capacité de production. C’est très gênant pour le renouvellement des flottes », regrette Anne Bertrand.

Les entreprises ont néanmoins trouvé la parade. Elles ont réorienté en majorité leurs achats sur les véhicules hybrides rechargeables et 100 % électriques, beaucoup plus disponibles que leurs homologues thermiques. Les constructeurs donnent en effet à leurs véhicules électrifiés la priorité dans l’approvisionnement de leurs composants électroniques. La crise permet ainsi d’accélérer la transition écologique des flottes en poussant les entreprises à ouvrir leur Car Policy à davantage de véhicules électrifiés.

« On oriente nos commandes sur les véhicules électrifiés aux délais de livraison beaucoup plus courts que ceux des véhicules thermiques. En 2021, les modèles hydrides et électriques ont représenté 65 % de nos commandes », illustre Anne Bertrand.

De même, Carglass a accéléré la transition énergétique de la flotte. « Face aux longs délais de livraison des véhicules, on a décidé de booster la transition écologique de notre parc en nous rapprochant de nouveaux constructeurs qui offrent des modèles électriques plus disponibles », confirme Mourad Fellah.

Gain fiscal et environnemental sur les véhicules hydrides et électriques

Il faut dire qu’en « verdissant » leurs flottes, les entreprises s’y retrouvent aussi bien sur le plan économique qu’écologique. « Les grands groupes et les PME qui achètent davantage de véhicules électrifiés font coup double. Ils en retirent un gain fiscal sur des véhicules peu polluants qui ne sont quasiment pas taxés grâce à leurs faibles émissions de CO2, et un gain environnemental sur l’empreinte carbone de leur flotte », explique Stéphane Crasnier.

D’autant que les entreprises s’accordent à constater que le coût total de détention (TCO) des voitures électriques tend à se rapprocher de celui des voitures thermiques, et donc d’être de plus en plus compétitif.

Lu 3234 fois Dernière modification le mercredi, 13 avril 2022 20:24
Bruno Mouly

Journaliste économique, avec près de 20 ans d'expérience en journalisme économique et en communication d'entreprise. Spécialisé en numérique, achats logistiques et mobilité. Il collabore également avec les Échos et le JDD.