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La gestion du risque client à l’export

La gestion du risque client à l’export

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S’il ne fait plus de doute que l’internationalisation des échanges commerciaux représente un fort levier de croissance pour les entreprises, la France compte pourtant encore trop peu d’exportateurs. Au-delà de la complexité des démarches à mettre en œuvre pour exporter, c’est également la persistance de certains risques qui freinent aujourd’hui encore de nombreuses ambitions. Pourtant, il existe de nombreux dispositifs pour accompagner les entreprises dans une meilleure gestion de leurs risques clients lorsqu’elles se développent à l’export.

Stephane ColliacLa conjoncture économique n’aura jamais été si propice à l’exportation. Dans son Baromètre Export 2018, Euler Hermes prévoit cette année une nouvelle croissance du commerce mondial tant en valeur (+8,4%) qu’en volume (+4,4%). « Ce dynamisme renouvelé, malgré un léger ralentissement par rapport à l’an passé, laisse augurer de belles opportunités à saisir pour les entreprises françaises à l’export », explique Stéphane Colliac, économiste en charge de la France chez Euler Hermes. L’assureur crédit estime par ailleurs que la demande additionnelle de biens adressée à la France devrait ainsi croître de 21,5 Mds d’euros en 2018 et de 18,2 Mds d’euros en 2019 (après 20,3 Mds d’euros en 2017).

Dans ce contexte économique favorable, plusieurs pays offrent de belles perspectives aux exportateurs français. « Cette année, les débouchés supplémentaires à capter à l’export pour les entreprises françaises proviendront en grande partie de l’Union Européenne, avec plus de 4 Mds d’euros à saisir en Allemagne, plus de 2,2 Mds d’euros en Italie, plus de 1,7 Mds d’euros en Espagne ou encore plus de 1,6 Mds d’euros en Belgique, poursuit Stéphane Colliac. Hors de l’Europe, ce sont essentiellement les États-Unis et la Chine qui offriront des débouchés aux exportateurs français ».

L’export sera notamment tiré par les secteurs des biens de consommation, de l’agroalimentaire et de la chimie. Les entreprises françaises pourront également continuer de capitaliser sur leurs savoir-faire reconnu dans les secteurs de l’automobile, la pharmacie, l’aéronautique, l’aérospatiale, le luxe, les technologies de l’information et de la communication.

Gérer le poste client à l’export

Malgré ces perspectives prometteuses, les exportateurs ne doivent pas occulter la persistance de certains risques, dont les impayés. Ce risque représente en effet la principale menace à l’export selon 58 % des entreprises interrogées dans le cadre du Baromètre Euler Hermes. Par ailleurs, en dépit d’un contexte macroéconomique et financier plutôt plus favorable, le délai moyen de paiement des clients dans le monde a, en 2017 augmenté de deux jours (66 jours) et devrait même atteindre les 67 jours en 2018.

« Certes, l’allongement du DSO moyen à l’échelle mondiale reflète avant tout un relâchement des bonnes pratiques de paiement entre les entreprises, indique Stéphane Colliac. Il en résulte cependant une moindre appréhension du risque de non-paiement de la part des entreprises, malgré la poussée des défaillances des grandes entreprises ».

Pour profiter des opportunités actuellement offertes par l’export tout en évitant le risque d’impayé et l’allongement des délais de paiement la gestion du poste client est, pour les exportateurs un impératif.

Miser sur les bons partenaires

Stephen LordDès la phase de prospection, l’entreprise doit choisir sa cible en tenant compte du risque pays et des opportunités de marché. Elle peut à cet effet s’appuyer sur les études économiques délivrées notamment par des assureurs crédits, les banques ou certaines administrations telles que l’OCDE. Il est ensuite important de se renseigner sur les us et coutumes d’un pays, les obligations légales, etc., auprès par exemple d’établissements publics, tels que Business France ou les Chambres de commerces internationales.

Un fois ces éléments macro-économiques analysés, l’entreprise peut alors rentrer dans la phase « business » de sa stratégie export. Il lui faut alors choisir et cibler les prospects les plus solides, les zones géographiques à l’intérieur même d’un pays (dans un même pays deux régions différentes peuvent apporter des risques et opportunités différents).

Dans le cadre de cette démarche, elle peut une nouvelle fois s’appuyer sur les assureurs crédits mais aussi sur les sociétés d’information ou encore ses partenaires bancaires. « L’entreprise a notamment la possibilité de demander des listes de clients et prospects selon les critères qu’elle a déterminé (par exemple, par taille, par activité, par zone géographique, les scoring…), précise Stephen Lord, Responsable de l’International chez Ellisphere et président de BIGnet. À partir de ce premier filtre, elle définit une cible de prospects dont elle peut alors analyser plus en profondeur et en détail le potentiel commercial grâce à un rapport d’information complet ».

Assurer le risque client

Dès lors que les partenaires commerciaux sont identifiés, il convient alors que l’entreprise se prémunisse contre le risque d’impayés, en recourant notamment aux assureurs crédit dont les solutions s’articulent autour de la prévention, le recouvrement et l’indemnisation. Elle peut également se tourner vers les banques qui pour leur part proposent, en matière de gestion du risque client, des outils tels que le crédit documentaire ou les « Stand By Letter of Credit », garanties bancaires de paiement à première demande dès lors que chacune des parties a rempli ses obligations. Ces garanties bancaires sont plus particulièrement adaptées pour les opérations commerciales avec les pays plus « exotiques » ou lointains. Elles permettent notamment aux entreprises françaises de s’affranchir des risques pays ou politiques.

Limiter les délais de paiement

« Tout l’enjeu pour l’exportateur français consiste également à se faire payer dans les meilleurs délais. Si en France, le processus de recouvrement des créances impayées est clair et juridiquement établi (tribunaux de commerce, huissiers ou avocats), à l’export il est souvent plus complexe pour l’entreprise de connaître les possibilités légales de recouvrement, les outils disponibles, les dispositifs à mettre en place, les interlocuteurs à contacter, les délais à respecter, etc. », explique Stéphane Colliac.

D’où l’intérêt de se faire accompagner dans cette démarche par une banque, un assureur credit ou un factor qui gèrera l’ensemble du processus pour lui, depuis les relances amiables jusqu’aux recours judiciaires. D’autant que si le partenaire n’a pas réussi ou réussi que partiellement à recouvrer la créance, alors il indemnisera l’entreprise.

Une démarche qui les aide non seulement à sécuriser la gestion de leur poste client mais également à préserver leur trésorerie. D’autant que pour financer leur exportation, la majorité des entreprises françaises tendent à puiser dans leur cash. Pourtant, les acteurs privés tels que les banques et les factors mais aussi l’administration française ne lésinent pas sur les moyens financiers visant à accompagner ou soutenir les entreprises qui souhaitent se développer à l’export.

Pour preuve, la nouvelle stratégie du Gouvernement en matière de commerce extérieur annoncée en février dernier et les nouveaux dispositifs mis en œuvre.

Le Gouvernement réforme pour mieux accompagner les exportateurs

Cette année, le gouvernement a clairement affiché sa volonté de transformer le modèle d’accompagnement des PME à l’export, afin que l’International constitue maintenant le débouché naturel de l’économie française. À l’issu des différentes consultations menées notamment dans le cadre de son plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), le gouvernement propose désormais d’avancer dans trois directions :

  • Une plus large diffusion d’une culture de l’export et de l’internationale, par le renforcement de la formation aux langues étrangères et au commerce international ;
  • Une réforme de l’accompagnement à l’export par un partenariat approfondi entre l’État et les régions en la matière et une plus grande simplification
  • Une réforme des financements export notamment pour les rendre plus lisibles pour les entreprises françaises et plus compétitifs vis-à-vis de la concurrence internationale.

 


Évolution des dispositifs publics

Le gouvernement va créer « un guichet unique » de l’export dans chaque région qui regroupera autour des opérateurs publics, CCI et Business France, tous les acteurs de l’export (agences régionales de développement, sociétés d’accompagnement et de commerce international, acteurs du financement export autour de Bpifrance).

De même, Bpifrance devient le point d’entrée unique pour les financements exports publics. Il assure désormais la diffusion des garanties publiques à l’export, gérées au nom de l’État par sa filiale « Assurance Export ».

Parmi ces différents outils figurent notamment une nouvelle mouture de l’assurance prospection, un Pass Export (partenariat de confiance sur mesure négocié entre l’État et un exportateur pour une durée de 3 à 5 ans), une nouvelle garantie pour les projets stratégiques à l’international, une garantie pour les filiales étrangères françaises, un outil de soutien financier à l’export pour soutenir les sous-traitants d’entreprises exportatrices, etc.

Lu 5563 fois Dernière modification le mardi, 25 juillet 2023 13:58
Anne Del Pozo

Elle collabore depuis près de 20 ans à différents magazines en qualité de journaliste.

Elle y traite de sujets articulés essentiellement autour de la finance, des flottes automobiles, du voyage et du tourisme d'affaires ou encore des ressources humaines. Anne del Pozo participe également à la rédaction de nombreux témoignages clients et de newsletters d'entreprise.