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Pacte Dutreil : le bon outil pour transmettre son entreprise

Pacte Dutreil : le bon outil pour transmettre son entreprise

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Le pacte Dutreil permet de transmettre son entreprise à ses enfants avec une réduction de 75 % des droits de donation à payer. Ces droits peuvent être davantage réduits si les actions données le sont en démembrement de propriété. Depuis bientôt 20 ans, ce dispositif très optimisant combine une forte réduction d’impôt et la stabilisation de l’actionnariat familial.

Quels sont les avantages et conditions de ce régime ?

Une exonération de 75 % des droits de donation

Signer un pacte Dutreil avec ses enfants permet au chef d’entreprise de leur donner des actions de sa société en bénéficiant d’une exonération de 75 % sur les droits de donation, sans limitation de montant. Il devra rester dirigeant de la société pendant au moins 3 ans après la donation, ou laisser un de ses enfants reprendre cette fonction.

Autre condition, le pacte doit porter sur un nombre d’actions minimum que les signataires ne pourront pas vendre pendant une certaine durée. Ce nombre doit représenter au moins 17 % des droits financiers et 34 % des droits de vote (10 % et 20 % si la société est cotée).

Attention, le pacte Dutreil n’est pas possible sur une SCI ! Il est en revanche autorisé sur les actions d’une société « interposée » si cette dernière détient des actions dans une société opérationnelle dirigée par le chef d’entreprise.

Enfin, le pacte Dutreil peut aussi être adopté sans procéder nécessairement à des donations. Dans ce cas, c’est sur les droits de succession que la réduction de 75 % pourra s’appliquer.

Des avantages fiscaux complémentaires 

  • Pour rappel, un abattement de 100000 euros est accordé sur les donations aux enfants si aucune donation ne leur a été faite dans les 15 dernières années. Cela permet ainsi de donner des actions valant 400000 euros sans droits de donation : le pacte Dutreil exonère 300000 euros (75 % de 400000 euros) et l’abattement de 100000 euros supprime le reste de la base taxable. 
  • Le chef d’entreprise peut aussi donner les actions en démembrement de propriété, en ne donnant que la nue-propriété des actions et en conservant l’usufruit. Il pourra ainsi continuer à percevoir les dividendes de la société, tout en réduisant la valeur des actions soumise aux droits de donation. Par exemple, s’il a 55 ans, la valeur des actions en nue-propriété sera réduite de moitié. Il peut ainsi donner en nue-propriété à chaque enfant des actions d’une valeur de 800000 euros sans droits de donation, alors qu’en l’absence de pacte, les mêmes actions reçues un jour par héritage par les enfants seront soumises à des droits de succession d’environ 150000 euros par enfant.

Pour une société d’une valeur de 10 millions d’euros dont les actions seraient données en nue-propriété à deux enfants avec pacte Dutreil, l’économie d’impôt serait d’environ 3,7 millions d’euros, avec seulement 200000 euros de droits de donation à acquitter. Cet exemple est basé sur une donation de toutes les actions, mais bien entendu il est possible de ne donner qu’une partie seulement du capital. 

  • Il est aussi possible de bénéficier d’une réduction de 50 % des droits dus (après l’application de l’exonération de 75 %) si le chef d’entreprise a moins de 70 ans et que les actions ne sont pas démembrées. 

L’engagement de conservation : contrainte ou chance ?

La principale contrainte du pacte Dutreil est double :

1. Un engagement collectif de conservation des actions pendant 2 ans, période pendant laquelle doivent être faites les donations. Si l’un des signataires vend des actions sous pacte, l’exonération de 75 % est remise en cause sur toutes les donations.

2. Un engagement individuel de conservation pendant 4 ans. Si l’un des enfants vend des actions, il devra payer les droits précédemment exonérés sur sa donation, sans remettre en question l’exonération pour les autres enfants. 

  • Cette contrainte est en réalité souvent une chance pour l’entrepreneur : elle lui permet de s’assurer du maintien d’un actionnariat familial stable pendant plusieurs années, d’autant plus que le pacte peut prévoir des durées de conservation plus longues. 

Un dispositif pérenne ?

Ce dispositif très intéressant rend possible l’anticipation des transmissions d’entreprises familiales. Il permet ainsi aux héritiers de ne pas être contraints de vendre la société familiale pour payer les droits de succession après le décès du parent chef d’entreprise. Il est pourtant parfois critiqué comme étant trop généreux, et pourrait être modifié, voire supprimé, notamment à l’issue des élections présidentielles. Les pactes déjà signés seront sans doute préservés. Il semble donc conseillé aujourd’hui plus que jamais de mettre en place cette solution de transmission d’entreprise.

Par Maître Frédéric Gérard, avocat au barreau de Paris. Il est un des deux associés fondateurs du cabinet Velvet Avocats, en charge du département Fiscal du cabinet.

Lu 14065 fois Dernière modification le mercredi, 16 février 2022 13:51
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