Imprimer cette page

Les modes alternatifs de règlement des conflits  : tout à gagner et rien à perdre !

Droit et Fiscalité Écrit par  mercredi, 06 novembre 2013 16:39 Taille de police Réduire la taille de la police Augmenter la taille de police
Évaluer cet élément
(3 Votes)

Quand les modes alternatifs de règlement des litiges se développent en entreprise aussi bien à l’étranger qu’en France, il est légitime de se demander si l’on ne peut pas s’affranchir des procédures judiciaires réputées lourdes, lentes et onéreuses et s’il n’est pas temps de régler autrement les conflits.


Il n’y a pas deux personnes qui ne s’entendent pas, il y a seulement deux personnes qui n’ont pas discuté » dit un proverbe Wolof (sénégalais). Et certains d’ajouter qu’il vaudrait mieux payer les juristes afin qu’ils évitent les procès au lieu de les déclencher.
Car le procès reste pour la plupart des dirigeants d’entreprises un épisode désagréable de la vie des affaires, dont on ne maîtrise ni la durée ni le résultat. En outre, certains conflits en entreprise peuvent avoir pour conséquence la rupture de tout lien contractuel. D’où le recours aux modes alternatifs de règlement des conflits tels que la transaction, la conciliation, la médiation ou encore l’arbitrage.

Ces modes amiables de résolution des conflits sont anciens et connus. En effet, de tout temps, la transaction a existé : ne dit-on pas qu’un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès ! Mais, depuis une vingtaine d’années, en Europe, ces modes alternatifs de règlement des litiges connaissent un succès grandissant. L’inspiration est venue des États-Unis où, dans les années 70, les ADR (Alternative Dispute Resolution) ont vu le jour.


« Le mode alternatif implique un choix entre l’emploi, par les justiciables, de deux solutions : l’appel au juge ou l’appel au bon sens, ce qui n’exclut pas que le juge ait aussi du bon sens » indique Maurice Mouthier*, avocat honoraire.
Il existe ainsi de véritables pratiques ayant pour objet soit de prévenir un litige, soit de le résoudre sans faire appel au juge, soit de stopper la machine judiciaire si elle a déjà été amenée à connaître l’affaire.
La rédaction de GPO Magazine vous propose de dresser un panorama des différents modes alternatifs de règlement des litiges, à l’exception de la transaction et de la conciliation que nous ne traiterons pas dans ce dossier. Nous verrons ensuite comment l’arbitrage et la médiation peuvent être utilisés en entreprise. Comment fonctionnent-ils ? Quel en est le coût, et pour quels litiges ? Enfin, quels sont les atouts de ces différents modes de règlement amiable des litiges ?

Panorama des différents modes de règlement amiable des litiges
Un certain nombre de directeurs juridiques le constate, le contentieux en entreprise a vécu et il n’est plus actuellement la panacée. C’est ainsi qu’une prise de conscience est née qu’un conflit, quel qu’il soit, pouvait se régler autrement que par la voie judiciaire. Au fil du temps, les pratiques de règlement amiable des litiges se sont développées : arbitrage et médiation notamment. L’objectif de ces pratiques étant le même : éloigner l’orage, c’est-à-dire le procès.
Quelles sont les différences entre ces pratiques ?
L’arbitrage est le mode de règlement d’un conflit, d’un différend, par une décision prise au terme d’une négociation menée par un tiers, l’arbitre. La sentence arbitrale a un caractère juridictionnel au même titre qu’un jugement. Elle est suscep­tible d’appel sauf si les parties ont décidé d’y renoncer dans la convention d’arbitrage.
La médiation quant à elle, est un processus amiable de résolution des différends. Son objectif est d’aider les parties à parvenir à une solution négociée optimale ou, à défaut, acceptable par l’ensemble des parties. Le médiateur n’est ni un juge, ni un arbitre mais plutôt un « catalyseur » dont l’objectif est de faciliter les négociations entre les parties afin de les aider à trouver elles-mêmes une solution à leur différend. L’accord intervenu fait l’objet, si les parties le souhaitent, d’un écrit transactionnel signé par elles, ce qui a l’avantage de lui conférer, entre elles, autorité dite de la chose jugée, c’est-à-dire sem­blable à celle d’un jugement.

Comment fonctionnent l’arbitrage et la médiation ?
Au préalable, il convient d’indiquer qu’une étude de faisabilité peut permettre au dirigeant concerné d’orienter son choix vers l’arbitrage, la médiation ou la justice traditionnelle pour régler un différend. « C’est un choix qui s’anticipe dès lors que les contrats peuvent prévoir une clause compromissoire ou clause d’arbitrage. La clause compromissoire ou clause d’arbitrage, doit être prévue entre les acteurs lorsque leurs relations commerciales sont bonnes. Lorsque le litige survient, les parties engagées doivent alors
respecter la procédure de la clause d’arbitrage. Bien entendu, en l’absence de clause compromissoire, les parties peuvent s’entendent à l’amiable pour recourir à l’arbitrage »  souligne Alice Pezard, avocat counsel au Cabinet Heenan Blaikie, conseiller honoraire à la Cour de Cassation. La convention d’arbitrage signée par les parties désigne l’institution d’arbitrage et son règlement. « Il est fréquent que cette clause vise le Centre de Médiation et d’Arbitrage de Paris (CMAP) qui sera saisi par lettre recommandée AR avec indication de la dénomination sociale du demandeur et du défendeur, le cas échéant le nom et l’adresse de leurs Conseils, l’objet du litige, les demandes et s’il s’agit d’un Tribunal Arbitral, l’indication de l’arbitre que le demandeur propose de désigner. La requête d’arbitrage, accompagnée des pièces justificatives, est fournie en autant d’exemplaires que de défendeurs, outre un exemplaire pour le CMAP. Elle n’est enregistrée que si elle est accompagnée du paiement des droits d’ouverture (1 196 € TTC pour le CMAP), puis est notifiée par le CMAP au défendeur par lettre recommandée avec AR (LRAR), qui a un mois pour répondre par LRAR » complète Catherine Leclercq-Huet, avocat associé au cabinet Armand Associés.

L’arbitrage et la médiation sont-ils adaptés aux PME ?
Force est de constater que l’arbitrage est utilisé dans les litiges importants. L’affaire Tapie a fait couler beaucoup d’encre mais il demeure que l’arbitrage n’est pas uniquement réservé aux grands groupes du CAC 40. « L’arbitrage est tout à fait adapté au règlement des litiges pour les PME. Le différend va être résolu plus rapi­dement que devant les juridictions étatiques.
Les arbitres sont souvent choisis en fonction du secteur d’activité de la société » indique Catherine Leclercq-Huet. Quant à la médiation, elle est également adaptée aux petites et moyennes entreprises.

Quels sont les avantages de l’arbitrage et de la médiation ?
L’arbitrage et la médiation offrent de nombreux avantages, notamment pour les PME. « L’arbitrage est une procédure couverte par la confidentialité alors que les audiences sont publiques devant les juridictions étatiques. S’agissant par exemple d’un différend lors d’une cession d’entreprise, les éléments échangés lors de la procédure d’arbitrage (prix, garanties données, difficultés liées à la gestion) sont couverts par la confidentialité. Les PME préservent ainsi le secret des affaires et les concurrents n’auront pas accès à ces éléments. Enfin, l’arbitre est soumis à une obligation de révélation afin de garantir son indépendance et son impartialité. L’arbitrage est donc une justice sur mesure, rapide et confidentielle : trois caractéristiques recherchées par les PME » indique Catherine Leclercq-Huet.
Pour Myriam Bacqué, la médiation comporte de nombreux avantages tels que la maîtrise du temps, des coûts et de la solution finale.

Quels sont les coûts de l’arbitrage, de la médiation ?
Les frais de l’arbitrage comprennent les honoraires du ou des arbitres et les frais administratifs. Ils sont supportés par les parties dans la pro­portion déterminée par la sentence. Leur mon­tant est fixé selon le barème en vigueur selon les centres.
Les frais et honoraires de médiation, quant à eux, sont fixés selon le barème en vigueur au moment de la saisine du Centre. Les parties conviennent entre elles de la répartition du coût de la médiation. À défaut d’accord sur ce point, ces frais sont supportés par la partie requérante.

Par Linda DUCRET

 

                                    

Deux questions à Myriam Bacqué, médiatrice et formatrice en médiation civile et commerciale, en tant qu’associée gérante de la Maison de la Communication à la Rochelle.

Que pensez-vous de la médiation pour une PME ?
> La médiation est particulièrement adaptée aux PME, même davantage que l’arbitrage. D’abord, les entreprises peuvent aller en médiation spontanément, sur simple demande de l’une des parties, avec ou sans avocat. Cependant, il est préférable de prendre un avocat, lequel aura un rôle de conseil important dans la médiation, notamment lors de la rédaction de l’accord intervenu entre les parties. Il faut souligner que dans 80 % des cas, la médiation aboutit à la signature d’un protocole qui met définitivement fin au conflit. Et même si aucun accord n’intervient (20 % des cas), chacun aura pu avancer sur la compréhension du conflit grâce à la médiation.

De réels atouts pour les entreprises moyennes ?
> La médiation a de nombreux atouts, notamment pour les PME. Elle permet aux dirigeants de conserver la maîtrise du temps, des coûts et de la solution finale. En effet, la médiation est un mode rapide et efficace de règlement des litiges : au minimum 24 ou 48 h et au maximum 2 mois en général, depuis la saisine du médiateur qui peut proposer aux parties des apartés confidentiels, pour tenter de débloquer une situation délicate et tendue. Les entreprises savent combien la médiation va leur coûter car les honoraires du médiateur sont connus par avance, et relèvent d’un tarif horaire, partagés par les parties. Enfin, la solution n’est jamais suggérée ni imposée par le médiateur, lequel reste neutre et impartial, principes intégrants de sa déontologie. L’accord intervenu sera donc le fruit de la créativité et de la volonté éclairée des dirigeants d’entreprises. Ils peuvent aussi, s’ils le souhaitent, demander l’homologation de leur accord au juge, ce qui lui donnera force exécutoire. La médiation, si elle bénéficie d’une grande souplesse, n’en est pas moins un processus structuré et efficace d’aide à la négociation qui assure une pérennisation des relations commerciales dans 6 cas sur 10, lorsqu'elle se solde par un succès.

                                    

 Sites sur la médiation en entreprise

- anm-mediation.com
Association Nationale des Médiateurs (ANM)

- cmap.fr
Centre de Médiation et d’Arbitrage de Paris (CMAP)

- médiation-ieam.com
Institut d’Expertise d’Arbitrage et de Médiation (IEAM)

- maisondelacommunication.fr
Médiateurs professionnels indépendants (La Rochelle).

Source : Myriam Bacqué, médiatrice et formatrice en médiation civile et commerciale
Lu 45446 fois Dernière modification le jeudi, 27 août 2015 14:34
Linda Ducret

Linda Ducret a une double formation : littéraire (hypokhâgne, licence de philosophie) et juridique (maîtrise de droit des affaires, DESS de Contrats Internationaux). En 1987, elle devient avocate et crée son cabinet en 1990. Elle exerce pendant 15 ans dans différents domaines du droit (droit des affaires, droit pénal, droit de la famille…).

Depuis 2005, elle est journaliste avec comme terrains de prédilections : les dossiers stratégie du dirigeant, propriété intellectuelle, nouvelles technologies, Incentive...Mais également les visions et les portraits d’entrepreneurs.

Écrire est l’une de ses passions. En 2009, elle publie un roman policier Taxi sous influence, finaliste du Prix du Premier roman en ligne.

Elle a publié un recueil de nouvelles : Le Ruban Noir ainsi qu’un polar : L’inconnue du Quai Henri IV.