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Entreprises en difficulté : un duo expert-comptable et avocat pour s'en sortir

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Cela n'arrive pas qu'aux autres. Accidents de parcours ou difficultés structurelles peuvent conduire l'entreprise à devoir faire face à de graves difficultés, et mettre en péril le patrimoine du dirigeant. Benoit Nowaczyk, associé Walter France et Philippe Saigne, associé Simon & Associés, ont expliqué lors d'une conférence organisée conjointement avec la DFCG* et animée par Pascal Ferron, vice-président de Walter France, comment mieux surmonter ses difficultés en faisant intervenir des spécialistes.

Rappelons que la France compte 4 millions d'entreprises, dont 3 à 4 % seulement emploient plus de 10 personnes. 590 000 se sont créées en 2017, dont la moitié d'auto-entrepreneurs. 50 % des entreprises disparaissent dans les 5 ans de leur création et on déplore 55 000 entreprises en défaillance par an. Ce taux de défaillance pourrait être nettement réduit, en agissant à trois niveaux. D'abord en s'organisant en amont avec la mise en place d'indicateurs clé qui permettent de suivre de près l'activité et d'anticiper les difficultés. Ensuite, en en parlant le plus rapidement possible à ses conseils. En effet, souvent le chef d'entreprise veut s'en sortir seul et « grille toutes ses cartouches » sans véritable stratégie. Et enfin, en faisant intervenir de véritables spécialistes des entreprises en difficulté.

> Les signaux d'alerte

Un divorce, une baisse de forme engendrant quelques mois de flottement et le chef d'entreprise passe de l'autre côté du miroir. Les événements suivants doivent l'alerter sur de probables difficultés à venir :

- maladie, divorce du dirigeant,
- départ d'un homme clé,
- perte d'un gros client. Dans 25 % des cas, les difficultés surviennent parce qu'un des principaux clients de l'entreprise n'a pas payé. Or rares sont les entreprises qui ont 6 mois ou 1 an de trésorerie...,
- non renouvellement d'un concours bancaire,
- obsolescence technologique (transition numérique, cybercriminalité),
- fraude,
- changement de règlementation.

> Une législation en perpétuelle évolution

Depuis 1967, la législation relative au traitement des entreprises en difficulté a beaucoup évolué. C'est un droit qui se forge en continu. Aujourd'hui, le corpus législatif est adapté et des possibilités existent. Pourtant, les taux d'échec sont importants : 2/3 des redressements judiciaires finissent en liquidation judiciaire et près de 7/10 des procédures ouvertes sont des liquidations judiciaires.

> Les enjeux : agir vite et bien

La prévention et la réactivité sont les maîtres mots de la réussite, pour identifier et mettre en œuvre rapidement la bonne solution. Dans la pratique, le chef d'entreprise a déjà essayé de s'en sortir seul, avant de faire appel à des conseils, et au détriment de la procédure judiciaire. Ceux-ci devront identifier la bonne solution en dérogeant aux règles de la vie normale des affaires. Une autre réalité doit impérativement être prise en compte pour que l'entreprise ait une chance de sortir de ses difficultés : le temps judiciaire n'est pas du tout le même que le temps économique.

Une autre clé du succès est la prise en compte de la psychologie du chef d'entreprise. Les conseils doivent passer beaucoup de temps avec le chef d'entreprise qui est nécessairement déprimé, mais qui devra passer l'étape du déni, accepter l'échec, et surtout mettre son ego de côté. Philippe Saigne relate une expérience révélatrice : « Il est parfois préférable que le chef d'entreprise laisse la main à un manager de transition qui saura prendre les mesures nécessaires à une restructuration souvent difficile à mener soi-même. C'est ce que j'ai conseillé récemment à un dirigeant en difficulté. Il n'a pas voulu en entendre parler. Quelques mois plus tard, il déposait le bilan. C'est très regrettable pour lui, car il a, en plus, perdu une grande partie de son patrimoine ». Souvent également, certains conseils orientent l'entreprise vers la procédure de sauvegarde sous prétexte que la caution sera difficilement exigible. Or cela ne sert strictement à rien, car si le plan de sauvegarde ne peut pas être respecté, tôt ou tard la caution sera appelée.

> Eviter la spirale fatale des 4 D

Dette, puis Dépression, puis Divorce, et enfin Décès par suicide ou maladie... Cette spirale dramatique guette tout dirigeant en difficulté. Pascal Ferron rappelle : « Or, il y a des solutions. Une association a été créée sur ce sujet il y a quelques années, l'APESA (Aide Psychologique pour les Entrepreneurs en Souffrance Aiguë), dont nous sommes d'ailleurs partenaire, que tous les conseils et tribunaux de commerce devraient connaître, afin d'orienter au plus tôt les dirigeants en détresse vers un soutien psychologique, bien avant que la spirale fatale ne s'abatte sur ceux. Car la combativité du dirigeant fait toute la différence et est déterminante dans sa capacité à redresser son entreprise. Il est pratiquement impossible de sauver l'entreprise d'un dirigeant qui a jeté l'éponge ! »

> Faire appel à des spécialistes qui se coordonnent

Le traitement des difficultés des entreprises est une spécialité qui ne s'improvise pas, et qui n'a rien à voir avec les missions traditionnelles des experts-comptables et des avocats. Généralement, les experts-comptables n'appréhendent pas toujours correctement l'impact sur la trésorerie et parallèlement, les avocats ne maîtrisent pas bien les comptes. D'où l'intérêt, pour les chefs d'entreprise, de faire appel à des structures spécialisées qui intègrent des experts des deux professions (comme la joint-venture Walter Simon créée à cet effet). Pour Benoit Nowaczyk : « Certes, souvent les chefs d'entreprise commettent une grave erreur en ne parlant pas de leurs difficultés à leurs conseils. Mais une fois que les difficultés sont là, faire appel à une équipe restreinte et spécialisée permet de limiter le nombre d'intervenants, d'établir très rapidement un diagnostic, de prendre des décisions concertées, et surtout d'agir vite ».

> Rattraper le temps perdu

La solution idéale selon laquelle le chef d'entreprise est venu consulter ses conseils aux premiers signes de difficulté se produit malheureusement rarement... A l'autre extrémité, si le dirigeant est déjà en retard sur bon nombre de factures, sur les charges sociales, etc, c'est logiquement directement l'état de cessation des paiements qui l'attend.

Plus le dirigeant voit la vérité en face tôt, plus il multiplie les chances de sauver son entreprise. Faire appel à une structure de conseil spécialisée permet au dirigeant de réduire le nombre d'intervenants, d'éviter les pertes d'information inhérentes dans les échanges entre des cabinets de conseil différents, et surtout, face à l'enchevêtrement des problématiques juridiques et financières dans ces situations, de gagner du temps et de l'efficience tout au long de la procédure.

Cela permet :
- de cerner efficacement les causes des difficultés,
- d'analyser conjointement les clauses juridiques de certains contrats et leurs implications en termes de marge,
- de disposer d'un diagnostic financier et de ses implications juridiques,
- d'identifier la bonne solution dans une zone dérogatoire de la vie normale des affaires, tout en maîtrisant l'environnement juridique des procédures collectives,
- d'être très réactif dans un environnement économique et juridique où le facteur temps est crucial.

Une bonne connaissance des textes permet de préparer efficacement un plan de redressement et une bonne connaissance de la situation économique de la société permet d'éviter une aggravation des difficultés conduisant à une liquidation.

> Exécuter efficacement les décisions prises

Le caractère crucial de la phase d'accompagnement de la restructuration rend indispensable un suivi centralisé. Une structure unique regroupant des spécialistes de la matière permet de vérifier la bonne tenue des indicateurs de gestion, le respect des engagements juridiques et leur correcte mise en œuvre : cession d'actifs, renégociation de contrats de prestations, etc.

*Association des directeurs financiers et de contrôle de gestion

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