Quand le numérique s’effondre, c’est la société qui vacille

Récemment, une panne d’électricité a plongé dans l’obscurité plusieurs quartiers d’une grande métropole européenne, en pleine période de tensions géopolitiques. Aucun missile lancé, aucune frontière franchie. Pourtant, les conséquences ont été immédiates : trains immobilisés, hôpitaux inaccessibles, communications gouvernementales silencieuses.

Sabotage, défaillance logicielle, cyberattaque, malware étatique ? Peu importe. Le numérique et le physique sont désormais indissociables. Quand l’un vacille, l’autre suit. Ce constat impose de dépasser la notion de « menace cyber » pour saisir une recomposition plus profonde : celle du pouvoir, de la confiance et de la résilience à l’ère numérique.

Les abus liés à l’IA, l’industrialisation des ransomwares ou la diplomatie numérique en témoignent : il est impossible de bâtir l’avenir sans protéger les infrastructures qui le rendent possible. Il est temps de cesser d’appréhender la cybersécurité comme une fonction informatique parmi d’autres. Elle est devenue une infrastructure civique essentielle.

Le risque a changé et notre approche aussi

Autrefois, la cybersécurité s’apparentait à la sécurité domestique : alarmes, verrous, clôtures. Aujourd’hui, le « foyer » est une cité mondiale, distribuée entre Clouds, applications, satellites et capteurs. Les menaces viennent d’États, de Bots, d’agents internes… ou du climat.

L’IA permet de générer des identités synthétiques et des campagnes de phishing. Les groupes de ransomware ont des services communication. Et ce sont les erreurs de configuration, non les failles zero-day, qui restent les vulnérabilités les plus exploitées.

Face à cela, un nouveau paradigme s’impose : la résilience. Sommes-nous capables de détecter une attaque avant qu’elle ne produise ses effets ? De restaurer instantanément des données saines ? De maintenir la confiance sans suspendre l’activité ?

Les bâtisseurs ont un rôle stratégique

Développeurs, architectes, ingénieurs Cloud : ils ne font plus seulement du code. Ils écrivent les règles d’engagement du monde numérique. Chaque fonctionnalité déployée peut devenir une vulnérabilité si elle n’est pas conçue avec clairvoyance. Chaque correctif différé peut précipiter une crise.

Il faut promouvoir les architectures sécurisées dès la conception, imposer des mécanismes de reprise immuables, audités, automatisés. Et surtout, contribuer aux politiques publiques. Car la régulation est inévitable. Autant qu’elle soit éclairée.

La décennie à venir sera celle de la résilience

Certaines initiatives réunissent ingénieurs, diplomates et ONG pour encadrer les cyberconflits comme on encadrait hier la prolifération nucléaire. Si des règles existent pour l’espace extra-atmosphérique, pourquoi pas pour le cyberespace ?

La décennie qui vient sera celle de la résilience : anticiper les menaces, encaisser les chocs, se rétablir rapidement. C’est une affaire de souveraineté technologique, de continuité d’activité, mais aussi de confiance démocratique.

La clé : la sécurité des données. Pas seulement les chiffrer ou les sauvegarder, mais les rendre immuables, inviolables, immédiatement restaurables. Ce qui ne peut être ni détruit, ni extorqué, est sans valeur pour l’attaquant.

Dans ce monde hyperconnecté, la résilience des identités devient vitale. Si des identifiants sont compromis, existe-t-il un plan de repli ? Une façon de rétablir la confiance sans tout interrompre ?

La cybersécurité n’est plus un métier, c’est une mission civique. Elle mérite un leadership stratégique. Il ne s’agit plus d’ajouter la résilience après coup. Il faut la penser dès le départ.

Car quand les lumières s’éteignent, ce qui compte, ce n’est pas l’identité de l’assaillant, mais notre capacité à tenir debout.

Par Kavitha Mariappan, Chief Transformation Officer de Rubrik

 

 

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