La traque aux coûts cachés se renforce

En matière de coûts cachés ou non identifiés, les postes voyage d’affaires et Mice ne font pas figure d’exception. Bien qu’ils soient particulièrement surveillés et fassent l’objet d’une stratégie de maîtrise des coûts, ces postes offrent néanmoins encore plusieurs leviers d’optimisation. Les activer suppose donc que les gestionnaires, qui en ont la charge, les identifient.
Que ce soit sur le voyage d’affaires comme sur les Mice, de nombreux coûts directs ou indirects ne sont pas toujours identifiés par les entreprises. « Par exemple, sur des centres de coûts classiques tels que l’aérien ou l’hôtellerie, certains sont peu connus et suivis, tels que ceux liés aux frais annexes. Or, ces coûts ne sont pas anodins ! », souligne à ce sujet Sébastien Marchon, directeur business consulting d’American Express GBT.
Optimiser le temps de réservation
En matière de coûts indirects, les entreprises prennent encore trop peu en considération ceux liés au temps passé par un collaborateur pour réaliser une réservation ou gérer ses notes de frais. « Un constat que nous faisons notamment dans les PME qui ont encore trop souvent une vision partielle de la dépense voyage, souligne Emmanuelle Bach-Donnard, directrice marketing et communication chez Havas Voyages. Dans ces entreprises, ce sont la plupart du temps les collaborateurs qui effectuent eux-mêmes leurs réservations et ils ont tendance à passer du temps pour trouver les prix les moins chers ». Un temps qu’ils ne consacrent pas à leur cœur de métier, par exemple, à chercher de nouveaux clients pour leur entreprise. De même, lorsqu’une PME fait le choix de dédier entièrement ou partiellement une personne à cette tâche, celle-ci passe encore trop de temps à chercher les meilleurs prix de billets sur des sites de B to C. Or, les billets les moins chers ne sont pas toujours les plus avantageux. « Le collaborateur qui pratique l’open booking peut avoir l’impression de gagner sur le prix, souligne Julien Chambert, directeur général d’Avexia Voyages. Pourtant ce n’est pas toujours le cas. Les stocks des compagnies aériennes ne sont pas toujours les mêmes sur les vols aller et sur les vols retour, ce qui peut, in fine, coûter plus cher à l’entreprise. D’autant que la pratique de l’open booking peut faire perdre à l’entreprise ses remises de fin d’année négociées avec la compagnie aérienne ». Par ailleurs, la plupart du temps, les vols les moins chers ne sont pas remboursables en cas d’annulation ou de report du déplacement, ce qui se traduit, pour l’entreprise, par une perte sèche. « Une perte qui peut néanmoins être en partie compensée par le remboursement de certaines taxes, telles que celle sur le carburant, auquel chacun peut prétendre même si le billet n’était pas remboursable », explique Julien Chambert. Des subtilités encore trop peu connues des entreprises…
Les agences de voyages, une aide précieuse
Pourtant, en s’appuyant sur une agence de voyages, toute entreprise a la possibilité de mieux identifier et maîtriser ces coûts. « Le recours à une agence de voyages l’aide à limiter ces coûts, précise Emmanuelle Bach-Donnard. L’agence tient compte, dans ses recherches de billets ou d’hôtels, de la politique voyage de l’entreprise mais aussi des habitudes de travail de ses collaborateurs et des risques d’annulation du billet, liés notamment à son activité ». Par ailleurs, les agences de voyages centralisent l’ensemble des dépenses de billetterie et d’hôtellerie et envoient ensuite chaque mois à l’entreprise un relevé unique qui génère un règlement unique (ou fonctionne via une carte logée). L’entreprise optimise ainsi ses processus de facturation… Enfin, avec les outils tels que les SBT (self booking tool) proposés par les agences de voyages, les entreprises gagnent un temps précieux dans la gestion de leurs réservations, d’autant que ces dispositifs peuvent intégrer les politiques voyages des entreprises. « Si la société dispose d’outils intégrés en la matière, tels qu’un SBT pour la réservation de son voyage ou d’un logiciel de gestion de notes de frais, ces démarches peuvent être très rapides », ajoute Sébastien Marchon. Certes, le recours à une agence de voyages a un coût. Néanmoins, mieux vaut parfois payer un peu plus cher une agence qu’avoir le sentiment d’avoir fait une bonne affaire en allant vers le vol ou l’hôtel le moins cher. « Ce ne sont pas toujours les prestataires les moins chers au début qui s’avèrent proposer les prestations correspondant le mieux aux besoins de l’entreprise », souligne Julien Chambert.
Optimiser le temps du voyage
Le temps passé à voyager peut également représenter un coût indirect non négligeable pour l’entreprise, notamment s’il n’est pas optimisé. Pour les collaborateurs qui ont de longues escales entre deux correspondances, l’attente dans un lounge lui permettra, par exemple, de travailler ou de se reposer en vue d’une réunion importante pour l’entreprise. « De même, la méconnaissance des collaborateurs sur les distances lors du déplacement qu’il réserve seul peut générer des coûts additionnels liés notamment à son transfert, ajoute Emmanuelle Bach-Donnard. Elle peut par ailleurs entraîner des retards à des rendez-vous, avec toutes les conséquences que cela représente en termes de retour sur investissement du déplacement ». L’expertise d’un travel planner dans une agence de voyages est, à ce sujet, indispensable à l’optimisation du déroulement du déplacement. Sa connaissance de la destination, des distances et des prestataires locaux permet en effet d’optimiser le temps passé entre différents lieux.
Les manques à gagner
Au-delà de ces différents coûts qu’elles n’identifient pas, les entreprises ont également trop peu de visibilité sur certains manques à gagner générés notamment par une mauvaise application de leur politique voyage.
De nombreuses grandes sociétés ont ainsi négocié des accords avec des prestataires du voyage et notamment des hôteliers. « Or, un programme hôtelier couvre rarement tous les besoins de l’entreprise en termes de nuitées, rappelle Sébastien Marchon. Leur taux d’utilisation n’est ainsi souvent que de 30 à 40 %. Certes, la négociation avec les hôteliers est importante, mais l’utilisation à bon escient de ce programme l’est tout autant. De même, ces accords sont parfois insuffisamment relayés localement par les filiales ». Il est à ce sujet important que l’entreprise utilise les bons canaux de distribution et mette en place les bons outils technologiques, pour que les politiques voyages soient mieux appliquées. « La démarche est d’autant plus importante dans les PME où les accords négociés par l’entreprise demeurent souvent méconnus des voyageurs, précise à ce sujet Emmanuelle Bach-Donnard. Les agences ont notamment pour vocation de relayer ces informations, voire de les mettre en œuvre en les intégrant dans leur propres outils de réservation online, les SBT, et même d’accompagner l’entreprise dans sa négociation avec les compagnies aériennes par exemple ». Certains SBT contrôlent ainsi que chaque réservation respecte bien les règles de la politique voyage de l’entreprise. « Ils permettent, par ailleurs, de vérifier si le prestataire aérien ou hôtelier est bien référencé dans la politique voyage ou propose des circuits de validation avant toute réservation », ajoute Sébastien Marchon.
Les catégories de dépenses insuffisamment contrôlées
En matière de voyages d’affaires, certaines catégories de dépenses ne font, par ailleurs, pas encore assez l’objet de contrôles assidus ou ne sont pas intégrées dans les politiques voyages des entreprises. C’est notamment le cas de celles liées à la location de voiture, aux taxis, aux transports urbains ou encore à la restauration. « Pourtant, des acteurs existent aujourd’hui en la matière et mettent à la disposition des entreprises des solutions leur permettant de renforcer leur visibilité sur les dépenses des collaborateurs, ajoute Julien Chambert. Par exemple, en matière de réservation, Business Table, un spécialiste de la gestion des repas d’affaires en entreprise, propose un portail en ligne dédié à la réservation des repas d’affaires (plateaux-repas, repas d’affaires, repas groupes, traiteurs) qui en facilite le suivi et le contrôle par l’entreprise ». Le paiement de ces services peut se faire via une carte logée. Grâce à ce système de règlement, couplé à la mise en place de vouchers prépayés, les collaborateurs n’ont plus d’avances de frais à faire. Le service comptable de l’entreprise gagne, de son côté, un temps précieux dans la gestion de ses notes de frais et de la saisie de ses factures, optimisant ainsi le suivi des dépenses en la matière.
La donnée, nerf de la guerre
L’optimisation des postes voyage et Mice passe enfin par la visibilité sur leurs coûts. « Les données proviennent de différentes sources telles que les agences de voyages, les opérateurs de cartes de paiement, les outils de gestion de notes de frais ou encore les prestataires, comme les compagnies aériennes ou encore les hôteliers, précise Sébastien Marchon. Autant de données diverses qu’il convient de consolider et de nettoyer pour ensuite pouvoir travailler sur l’optimisation des coûts ». L’entreprise peut alors réaménager sa politique voyage et Mice de manière à ce qu’elle soit exhaustive et adresse l’ensemble des coûts. Ces données sont également des éléments sur la base desquelles les entreprises peuvent s’appuyer pour négocier avec les fournisseurs….
Ainsi, les pistes d’optimisation des coûts liés aux déplacements professionnels sont encore nombreuses. Les activer suppose néanmoins que les entreprises identifient mieux leurs centres de coûts et n’hésitent pas à s’appuyer sur les prestataires et les outils les mieux adaptés pour les aider dans cette démarche.
Anne DEL POZO
Quels sont les enjeux de coûts liés aux Mice ? Comment mieux maîtriser ces coûts ? |