La guerre du gaz naturel est déclarée !

Alors que la mise en œuvre de la déréglementation des tarifs vient d’être « redynamisée » par l’Union Européenne, tous les nouveaux opérateurs agréés fourbissent leurs armes. Les quelques 10,5 millions de particuliers utilisateurs1 de GN (gaz naturel) sont un gisement de développement pour les acteurs alternatifs, mais aussi bien sûr, les entreprises notamment les industries, petites, moyennes ou grandes. Un grand chambardement est en cours. Ses conséquences économiques seront considérables.
Depuis le 1er août 2000, le marché français de la fourniture de gaz naturel a été progressivement ouvert à la concurrence, la dernière étape étant intervenue en juillet 2007, avec l’ouverture à la concurrence du marché des particuliers. Tous les consommateurs (particuliers ou industriels) ont dorénavant la liberté de choisir leur fournisseur de gaz. Mais cela, manifestement, ne se sait pas suffisamment !
Bruxelles, estimant que le fonctionnement de la concurrence ne se développait pas assez rapidement depuis 2007, a publié un nouvel agenda de mise en œuvre (cf. encadré « À propos des tarifs réglementés »). Les opérateurs historiques (GDF Suez + Tegaz2 + une vingtaine de petites Entreprises Locales de Distribution) détiennent encore une part significative des différents marchés. Chez les particuliers, GDF Suez à lui seul maîtriserait encore de l’ordre de 80 % du marché. Chez les professionnels, le ratio est très nettement plus faible : 23 %. GDF Suez a bien résisté durant les premières années sur le marché des entreprises et des professionnels. Mais, confronté à deux phénomènes, il a aujourd’hui du mal à résister face, d’une part, à l’agressivité commerciale des nouveaux opérateurs agréés GN et, d’autre part, face à la récente obligation faite aux professionnels d’abandonner les tarifs réglementés – dit le barème, sans possibilités de retour – selon un agenda précis établi d’après leur volume de consommation exprimée en KWh.
1. Au Total 11,4 millions de particuliers + industriels/professionnels
2. Devenu Total Énergie Gaz
De sérieuses économies sont en perspective !
Tous les fournisseurs, historiques et alternatifs confondus, développent des trésors d’imagination pour garder ou capter une nouvelle clientèle. Les économies potentielles sont réelles et importantes, en moyenne entre 10 et 20 % selon le fournisseur retenu et le type de contrat. Package à prix fixe sur deux ou trois ans, gratuité du premier mois d’abonnement en cadeau de bienvenue, contrats flexibles résiliables quasiment sans préavis, programmes de fidélisation, bilan et conseils énergétiques en préliminaires… tous les acteurs se livrent une guerre sans merci au niveau des prix et des services !
Quoi qu’il en soit, il est certain que les bénéficiaires de cette bataille sont d’ores et déjà les clients. À une condition : oser consulter les nouveaux opérateurs. Certes, l’idée de changement fait son chemin mais on assiste parfois à un phénomène étonnant par les temps qui courent : rassurés et bien installés dans leurs relations avec leurs fournisseurs habituels, certains clients hésitent à les mettre en concurrence puis à les abandonner. La nouvelle législation les obligera rapidement à le faire pour leur grand bénéfice. Qu’ils se rassurent, changer de fournisseur du jour au lendemain n’interrompra nullement leur alimentation et la molécule de GN est strictement identique.
L’Energy Manager, une nouvelle fonction
Un salon-forum relativement discret s’est déroulé le 4 juin dans l’Espace Aveyron de Bercy Village : Energy Forum. Publiée en partenariat avec l’ATEE1, l’Afnor et Dalkia (société spécialisée dans l’efficacité énergétique), une étude2 révèle l’importance croissante qu’accordent les entreprises à la gestion de l’énergie. Simultanément à cette préoccupation, aux conséquences économiques importantes, apparaît un nouveau métier : l’Energy Manager (le gestionnaire d’énergie).
Cette étude annonce que 59 % des entreprises interrogées ayant intégré un Energy Manager connaissent beaucoup mieux le détail de leur consommation par destination (service, département, sites, etc.), ce que manifestement elles ne pouvaient faire avant d’avoir intégré cette nouvelle fonction. Elles estiment par ailleurs que leurs prévisions de consommation sont nettement plus précises, ce qui constitue une donnée essentielle au moment de la négociation des contrats et des engagements. Conscientes des enjeux économiques, 85 % des entreprises pensent qu’on ne peut pas confier cette mission à n’importe qui. L’Energy Manager doit avoir de solides connaissances : expérience en gestion de projet, connaissances approfondies techniques et énergétiques, etc.
Pour 30 % d’entre eux, les Energy Managers en place sont prudents. Ils estiment qu’ils doivent s’entourer d’un cabinet conseil spécialisé. Pour les grandes entreprises3, rappelons que la réglementation leur impose de publier un audit énergétique annuel d’ici fin 2015 : une échéance, eu égard aux enjeux, qui va très vite arriver.
En résumé, l’épilogue de cette guerre entre opérateurs est limpide. Que le meilleur gagne !
Philippe DERMAGNE
1. Association Technique Énergie Environnement
2. Enquête d’avril 2014 – Échantillon de 120 responsables en charge de l’énergie, dont les 2/3 issus de l’industrie
3. 250 salariés et 50 M€ de CA ou 43 M€ de bilan
Composition du prix du GN Production : 48 % Source : developpement-durable.gouv.fr |
Principaux opérateurs agréés vente GN (par ordre alphabétique) Altergaz Source : developpement-durable.gouv.fr |
À propos des tarifs réglementés Les tarifs réglementés de vente de GN pour les consommateurs non résidentiels seront progressivement supprimés à partir de 2014, afin de se mettre en conformité avec le droit européen. Qui est concerné ? Quel est l’échéancier ? Source : Direction générale de l’énergie et du climat – Extrait de la Note de novembre 2013 |