Préserver sa rentabilité face à la hausse des prix
Le contexte fortement inflationniste de ces derniers mois n’est pas sans conséquence sur l’équilibre financier des entreprises et peut impacter les contrats d’entreprise et la gestion du poste clients. Pour préserver leurs marges face à la hausse des coûts, voire éviter de se retrouver dans l’illégalité en vendant à perte, les entreprises ont néanmoins la possibilité d’activer différents leviers. Tour d’horizon.
L’année 2022 a été marquée par le retour de l’inflation à des niveaux inconnus depuis plusieurs décennies. Elle est notamment portée par la hausse des coûts des matières premières et de l’énergie, mais également par des tensions sur les chaînes de production et d’approvisionnement. Dans ce contexte de hausse des coûts, tout l’enjeu pour les entreprises consiste à limiter l’impact de cette inflation sur leur activité et à préserver leur marge.
L’anticipation passe par des contrats commerciaux bien ficelés
Bien que l’adaptation des prix de vente en fonction des coûts de revient soit souvent le premier réflexe, il convient néanmoins, pour ne pas perdre de client, de le faire de manière raisonnée. Une démarche qui nécessite notamment d’être vigilant sur la rédaction des conditions générale de vente et des devis, afin d’anticiper de possibles fluctuations de prix, et d’y intégrer des clauses particulières.
Durée de validité des devis
Il est par exemple possible de revoir les caractéristiques d’un contrat client en temporalisant ses propositions commerciales et en insérant une durée de validité dans ses devis. L’entreprise se prémunie ainsi contre la hausse des coûts des matières premières.
Clause de révision des prix
Les entreprises ont également la possibilité de prévoir, dans leur contrat de vente ou leur devis, « une clause de révision des prix ». Cette clause doit être prévue en amont de la réalisation du produit ou du service concerné, et acceptée par les deux parties dans le devis.
« Une clause de révision ne joue que si l’on constate une évolution d’indice, explique un avocat au barreau de Strasbourg, spécialisé dans le droit des affaires. L’indice choisi pour cette révision doit être indiscutable et considéré comme un référentiel du secteur d’activité ». Si l’indice augmente, cette clause permet d’ajuster le prix à la hausse. « Elle peut néanmoins aussi occasionner une renégociation à la baisse revendiquée par le client », souligne l’avocat.
Depuis le mois de mai 2021, le gouvernement impose ainsi une clause de révision des prix pour les marchés publics sensibles à une évolution du prix des matières premières.
Clause d’imprévu
Les devis et contrats peuvent également intégrer « une clause d’imprévu » en cas d’événement inopiné. Cette clause permet à l’une comme à l’autre des parties signataires d’exiger que s’ouvre une nouvelle négociation lorsque survint un événement imprévisible (de nature par exemple économique ou technologique) qui rend ainsi l’exécution du contrat excessivement onéreuse pour l’une des parties.
« La partie qui doit supporter des coûts imprévus peut alors demander à renégocier le contrat ou y mettre un terme », précise l’avocat.
Accélérer les délais d’exécution
Côté fournisseur, les entreprises ont également la possibilité de limiter l’impact de la hausse des coûts de différentes manières. Dès lors que le devis est signé, les entreprises doivent ainsi être vigilantes sur les bons de commandes qui s’en suivent. Si le délai entre l’acceptation d’un devis et la réalisation de la prestation est court, alors elles limitent leur exposition aux risques de hausse des coûts. À l’inverse, si ce délai est plus long, elles risquent de se trouver confronter à une hausse des prix des matières premières.
Augmenter les stocks
L’augmentation des stocks, donc des quantités achetées, est aussi un levier utilisé pour fixer un prix d’achat et ne pas subir sa hausse. Tout l’enjeu consiste alors à faire des prévisions de vente qui soient le plus juste possible afin d’anticiper sur l’achat de marchandises ou de matières premières à un prix connu. Il ne s’agit alors pas de « sur stocker » mais d’acheter des quantités prévisibles, ce qui évite par la même occasion les risques liés aux retards d’approvisionnement.
Plébisciter les outils de gestion du risque de change
Call Option
Les entreprises ont également la possibilité de recourir à des options d’achats de matières premières sur les marchés financiers. Une option d’achat (call option) est un produit financier donnant le droit, mais non l’obligation, d’acheter une action, des matières premières ou des devises à une date donnée, à un prix fixé à l’avance.
Swap de matières premières
Les Swaps de matières premières sont fréquemment utilisés par les entreprises industrielles qui se fournissent régulièrement en matières premières. Ces « commodity swaps », contractés généralement auprès des banques, leur offrent une couverture contre le risque de change de prix de ces matières premières, et leur permet de conserver leur marge bénéficiaire.
Optimiser la gestion du poste client
Enfin, pour limiter les impacts de l’inflation sur leur trésorerie, les entreprises ont également la possibilité d’optimiser leur gestion du poste client. À cet effet, elles peuvent notamment revoir à la baisse les délais de paiement de leurs clients.
(Re)vente à perte : ce à quoi les entreprises s’exposentAlors que la vente à perte n’est pas légalement interdite en France, que ce soit sur des prestations de services ou sur la vente de produits ayant subi une transformation de la part du revendeur, ou encore sur les ventes consenties par un fabricant sur ses propres produits, selon l’article L442-2 du commerce, vendre à perte reste sanctionnable dans le cadre des dispositifs anticoncurrentielles. Il n’est donc pas possible de vendre à des prix abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation, ou d’utiliser des « prix prédateurs » en fixant des prix de vente à perte ou en renonçant à des profits courts termes. Ces pratiques étant en effet jugées comme ayant pour but d’évincer ou de discipliner un ou plusieurs concurrents. (Conseil de la concurrence n° 07-D-09 du 14 mars 2007). Il est par contre interdit de revendre ou d’annoncer la revente d’un produit au-dessous de son prix d’achat effectif. Sept exceptions sont cependant prévues, telles que la vente liée à une cessation ou un changement d’activité commerciale, la vente lors de fins de saisons ou lors des période comprise entre deux saisons de vente, l’obsolescence technique ou des produits démodés, le réapprovisionnement à la baisse, l’alignement sur un prix plus bas légalement pratiqué dans la même zone d’activité par les magasins dont la surface de vente n’excède pas 300 m2 pour les produits alimentaires et 1000 m2 pour les produits non alimentaires, les produits périssables menacés d’altération rapide et les produits soldés mentionnés à l’article L. 310-3 du Code de commerce. En cas de manquement aux dispositions relatives à la revente à perte, les amendes peuvent aller jusqu’à 75 000 euros pour une personne physique, 375 000 euros pour une personne morale. Éviter la faute de gestion en maîtrisant ses coûts de revient et ses délaisUn malentendu avec un partenaire de l’entreprise (fournisseur, sous-traitant, etc.), une erreur d’appréciation du prix d’un composant de son produit peut amener une entreprise à vendre à perte à ses clients. Un défaut de trésorerie mal anticipé peut mettre l’entreprise en difficulté et constituer une faute de gestion, d’où la nécessité d’être vigilant sur la relance des règlements clients en attente. Céline Prieur |
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