Facturation électronique : comment réussir sa mise en conformité réglementaire ?

Les échéances relatives à la mise en place de la facturation électronique pour les entreprises françaises assujetties à la TVA se rapprochent. Entre 2024 et 2026, elles devront progressivement, en fonction de leur taille, être en capacité d’émettre des factures électroniques, en passant directement par le portail public de facturation (PPF), au travers d’un opérateur de dématérialisation (OD) ou d’une plateforme de dématérialisation partenaire (PDP).


Cependant, dès le premier juillet 2024, toutes devront être en capacité de recevoir des factures de manière dématérialisée. Or, pour le moment, cette réglementation suscite encore bien des interrogations de la part des entreprises.

À ce jour, le niveau de maturité des entreprises par rapport à l’obligation de facturation électronique reste très variable.

« Les grandes entreprises, qui seront les premières concernées par le passage à la facturation électronique, ont déjà engagé leur projet en la matière », explique Alexis Hartmann, VP France et UK de Basware.
Christiaan Van Der Valk chez Sovos

« C’est en particulier le cas pour celles qui opèrent à l’international dans des pays où la facturation électronique est déjà obligatoire comme en Italie, en Turquie ou encore au Mexique, précise pour sa part Christiaan Van Der Valk, vice-président de la stratégie de Sovos. En revanche, le niveau de maturité des PME et ETI sur le sujet est bien moindre.

» Le flou qui entoure encore de nombreux points de la réforme, notamment ceux concernant l’immatriculation à venir des plateformes de dématérialisation partenaires, ne les incitent pas à engager dès à présent un projet pour leur mise en conformité », ajoute Alexis Hartmann.

Ainsi, selon l’enquête Esker/OpinionWay sur « Les entreprises et l’obligation de facturation électronique », 29 % des entreprises n’auraient pas encore entamé de démarches pour se conformer à l’obligation de facturation électronique. D’autre part, les entreprises sont encore très nombreuses à ne pas avoir encore recours à la facturation électronique : près d’une entreprise sur quatre (23 %) échange moins d’un quart des factures au format électronique, dont 15 % n’échangent aucune facture client au format numérique.

Forte appréhension des directions financières

« La mise en conformité avec cette réglementation continue ainsi de susciter de l’appréhension », explique Thomas Honegger, directeur des opérations d’Esker France.

31 % des DAF craignent ainsi sa mise en place, dont ils estiment qu’elle sera coûteuse (55 %) et complexe (53 %). Des craintes auxquelles s’ajoutent les problématiques de la sécurité des données pour 47 % des DAF interrogés. Pour certains, l’appréhension s’explique aussi par le manque d’information : 19 % des sondés se disent mal informés sur la réglementation à venir. Enfin, 34 % estiment que le calendrier de mise en conformité est trop court.

« Cette réforme soulève donc encore de nombreuses inquiétudes de la part des directions financières, poursuit Thomas Honegger. Certes, les entreprises commencent à y voir plus clair sur leurs obligations, cependant, le calendrier des échéances demeure un véritable challenge pour nombre d’entre elles ».

Des opportunités bien identifiées

Bien qu’elles n’aient pas encore engagé leur mise en conformité, les directions financières en perçoivent néanmoins les bénéfices. Interrogés sur l’impact de la généralisation de la facturation électronique, les DAF identifient des opportunités pour leur entreprise : 89 % prévoient que la facturation électronique va accélérer la transformation digitale de leur entreprise et 55 % anticipent un gain de compétitivité.

De fait, l’un des principaux gisements d’efficacité de la facture électronique réside dans l’automatisation d’un certain nombre de tâches de vérification, de validation et de transmission, tout au long du processus de traitement métier. Cette réforme va également contribuer à structurer les formats de factures.

Plus des trois quarts des DAF (79 %) estiment ainsi que la généralisation de la facturation électronique facilitera leur travail quotidien, notamment grâce à l’automatisation. In fine, elles optimiseront l’ensemble de leurs flux liés à la chaîne de facturation, et donc en rationnaliseront les coûts qui y sont liés.

« La mise en conformité des entreprises avec la réforme sur la facturation électronique est ainsi une véritable occasion d’harmoniser et d’optimiser l’ensemble des processus de traitement des factures, et de réorganiser la façon dont les équipes comptables travaillent », précise ainsi Alexis Hartmann.

Une mise en conformité qui peut en effet être l’occasion pour l’entreprise de renforcer et d’optimiser la gestion de ses achats, de sa trésorerie, de ses fournisseurs, de ses risques, etc.

Des trésoreries optimisées

Toujours selon l’enquête Esker/OpinionWay, une majorité de directions financières estime ainsi que le passage à la facturation électronique permettra d’améliorer la gestion de leur trésorerie (56 %) et participera à la réduction des délais de paiement (53 %). 55 % des DAF anticipent par ailleurs, grâce à cette réforme, une amélioration de leurs relations avec leurs clients et fournisseurs.
Thomas Honegger directeur des Operations dEsker France

« Le passage à la facturation électronique va éga lement contribuer à l’explosion du volume des données, offrant ainsi à la finance de nouvelles opportunités, précise Christiaan Van Der Valk. Avec ces données structurées, il leur sera par exemple plus simple de mettre en place des dispositifs de Supply Chain Finance (SCF) ou d’affacturage inversé, ce qui contribuera à l’amélioration de leurs relations avec leurs fournisseurs. Elles pourront également réaliser des prévisions budgétaires bien plus précises et disposer d’une visibilité en temps réel sur leurs comptes ».

L’analyse de ces données leur permettra, par ailleurs, de renforcer le pilotage de leur activité, mais également d’accompagner les directions opérationnelles ou leur direction générale dans leurs prises de décisions.

« Dès lors que l’entreprise envisage sa mise en conformité dans le cadre d’un projet plus global d’automatisation de l’ensemble de ses process de gestion, alors elle pourra piloter plus efficacement son activité, précise Thomas Honegger. La transmission d’une facture entre l’émetteur et le récepteur et/ou le portail public de facturation (PPF) ne sera en effet qu’une « commodité. La valeur de cette démarche reposera par exemple sur la capacité du système mis en place à réconcilier une facture avec son bon de commande ou de réception, ou encore à générer un paiement ».

Les entreprises doivent se mettre en ordre de marche

Pour saisir ces opportunités et tirer bénéfice du passage à la facturation électronique, il convient néanmoins que les entreprises engagent dès maintenant leur transition. Il est d’autant plus important qu’elles se penchent dès aujourd’hui sur le sujet, car il leur faudra choisir la plateforme à utiliser (plateforme de dématérialisation partenaire, opérateur de dématérialisation, ou portail public de facturation).

Ce choix dépendra notamment du volume des flux et des formats de facturation en place dans l’entreprise, mais également des objectifs qu’elle se fixe dans le cadre de sa mise en conformité avec la réglementation.
Alexis Hartmann

« Le passage à la facturation électronique n’est pas un projet si simple à mener, souligne Christiaan Van Der Valk. Il est important d’en comprendre préalablement les impacts sur les processus et les applications en place. Il ne faut pas, par exemple, présumer de l’interopérabilité entre l’ERP ou l’outil comptable avec la plateforme de dématérialisation qui sera retenue par l’entreprise. De même, il ne pas faut pas présumer de la capacité des outils en place à recevoir des factures dématérialisées dès le 1er juillet 2024. Nous conseillons donc fortement aux entreprises de se renseigner auprès de leurs partenaires éditeurs mais également de leurs principaux clients sur ces sujets d’interopérabilité ».

La mise en place de la facturation électronique suppose également que les entreprises s’interrogent sur l’organisation comptable et financière qu’elles entendent mettre en place.

« Certaines vont ainsi profiter de cette réforme pour réinternaliser le traitement des factures qu’elles avaient confiées à des sociétés Offshore ou à des centres de services partagés, souligne Alexis Hartmann. Une organisation qui pourrait ne plus avoir lieu d’être grâce à l’automatisation des processus de gestion des flux de facturation ».

Elle nécessite par ailleurs que les entreprises remettent à plat la gouvernance des données et nettoient leur base de données clients et fournisseurs.

« Elles doivent à cet effet réaliser dès aujourd’hui une cartographie des données et des flux de facturation, précise Thomas Honegger. C’est également dès maintenant qu’elles doivent s’interroger sur le dimensionnement de leur projet et de son extension à des flux connexes à la facture ».

Les éditeurs d’ERP et de GED se mobilisent également fortement autour de ce sujet, tant pour adapter leur solution et les rendre interopérables avec les futures plateformes de dématérialisation partenaires (quand ils n’envisagent pas eux-mêmes de le devenir) ou le portail public de l’État, que pour accompagner les entreprises dans leur mise en conformité.

Anne Del Pozo

Elle collabore depuis près de 20 ans à différents magazines en qualité de journaliste. Elle y traite de sujets articulés essentiellement autour de la finance, des flottes automobiles, du voyage et du tourisme d'affaires ou encore des ressources humaines. Anne del Pozo participe également à la rédaction de nombreux témoignages clients et de newsletters d'entreprise.

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