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L’ancien dirigeant de droit de la personne morale débitrice peut présenter une offre de reprise

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L’article L.642-3 du Code de commerce fixe une liste de personnes qui ne sont pas admises, directement ou par personne interposée, à présenter une offre de reprise, par plan de cession, de l’activité et des actifs d’une entreprise faisant l’objet d’une procédure collective.

Parmi cette liste, figurent notamment les parents ou alliés du débiteur, les dirigeants de droit ou de fait de la personne morale ou encore les personnes ayant ou ayant eu la qualité de contrôleur au cours de la procédure.

En revanche, le texte ne cite ni les associés ni les anciens dirigeants. S’agissant de ces derniers, la question était toutefois débattue.

 
Les interdictions doivent s’interpréter strictement

Dans un arrêt du 23 septembre 2014*, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a posé clairement le principe selon lequel l’ancien dirigeant peut déposer une offre de reprise car il n’est pas dans la liste de personnes exclues. Les interdictions doivent s’interpréter strictement.

Dans l’espèce ayant donné lieu à l’arrêt susvisé, l’ancien dirigeant d’une entreprise de conception de jeux automatiques, dont le redressement judiciaire avait été ouvert en décembre 2011, avait présenté une offre de reprise que le Tribunal de commerce avait déclaré irrecevable.

Un pourvoi en cassation a été formé par l’ancien dirigeant.

Le 23 septembre 2014, la Chambre commerciale de la Cour de cassation indique qu’il ne résulte pas de l’article L.642-3 alinéa 1 du Code de commerce que l’ancien dirigeant de droit de la personne morale débitrice serait frappé d’une interdiction de présenter une offre d’acquisition de l’entreprise, sauf en cas de fraude.

Par cet arrêt, la Cour de cassation applique donc strictement la loi en reconnaissant finalement l’intérêt légitime de l’ancien dirigeant ayant quitté l’entreprise depuis plusieurs années à reprendre l’activité puisqu’il la connaît.

Elle réserve toutefois l’hypothèse de fraude, non définie précisément en l’espèce, mais ne tient pas compte ni de la raison du départ du dirigeant, en l’espèce des poursuites judiciaires avec une interdiction de gérer, ni de la proximité de son départ avec la date du dépôt de bilan.

Or, la finalité de l’article L.642-3 susvisé consiste bien à éviter que le dirigeant qui a conduit la société au dépôt de bilan puisse à nouveau diriger la société tout en ne prenant pas en charge le passif.

Nul doute en conséquence, nonobstant l’arrêt susvisé, que les tribunaux seront particulièrement attentifs dans l’examen des offres de reprise, puisque, si le filtre de la recevabilité est passé, il restera encore à convaincre le tribunal de la pertinence de l’offre et de la capacité de l’ancien dirigeant à pérenniser l’activité.

 

Jérémy ROVERE
Avocat, département commercial / procédures collectives, cabinet Vincent Ségurel

Alexandre CORNET
Associé, département commercial / procédures collectives, cabinet Cornet Vincent Ségurel


*Cass. com., 23 sept. 2014, n° 13-19.713 et 13-25.708, FS-P+B, Société Francy-matic et a. c/ M. Jean-Michel Billioud ès qual. : JurisData n° 2014-021756

 

Lu 12233 fois Dernière modification le jeudi, 24 septembre 2015 13:41
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